30 Mai 23 bar italia – ‘Tracey Denim’
Album / Matador / 19.05.2023
Indie slowcore
C’est sans aucun doute la hype du moment pour tout amateur de musique indie. Une hype certes discrète, mais indéniablement montante depuis maintenant quelques mois que bar italia entretient ce mystère qui l’entoure. Volontairement peu présent en médias, le trio en dit le moins possible, se contente d’une image pour le moins rudimentaire, comme pour laisser le champs libre à sa musique, prometteuse bien que restée jusque-là relativement anonyme. Pour autant, deux albums et un Ep sortis en l’espace de deux ans sur le label World Music du dénicheur Dean Blunt auront suffi à convaincre Matador de signer cette formation composée de Nina Cristante (NINA) et du duo Jezmi Tarik Fehmi et San Fenton (Double Virgo).
Une discrétion et une certaine forme d’anonymat qui pourraient prendre fin avec ce Tracey Denim, magnifique écrin voué à figurer parmi les meilleurs album de l’année… Pourtant, à son écoute, on a indéniablement le sentiment d’avoir déjà entendu ce registre décliné à maintes reprises. Philosophie musicale tirée du post-punk, élans slowcore, production type rock slacker 90’s… Tous les ingrédients ici sont certes connus de tous, mais considérer bar italia comme un simple trio d’arrivistes adoptant cette posture nonchalante du groupe des nineties enregistrant encore sur un multi-pistes tout crasseux, serait une véritable erreur. Ce serait même grandement sous estimer la puissance hypnotique de la plupart des titres composant ce Tracey Denim à l’étincelante fraicheur digne d’un premier effort.
Enregistré par les trois londoniens eux-mêmes, et mixé par Marta Salogni (Björk, M.I.A, Black Midi), ce disque est une merveilleuse collection de compositions palpitantes aux allures lo-fi, parfois légèrement bruitistes, alternant avec beaucoup de nuances entre des tonalités obscures et d’autres plus lumineuses. A la croisée d’Electrelane et Broadcast, l’entame Guard nous séduit ainsi d’emblée : un charme qui ne cessera d’opérer, de Nurse! à Changer, en passant par Horsey Girl Rider ou Friends, et ce jusqu’à l’héroïque conclusion Maddington. Adoptant un format pop qui ne dépasse que très rarement les trois minutes, chaque titre obéit ici à une esthétique brute et une forme de naïveté audacieuse qui font chavirer les coeurs et font résonner ce Tracey Denim comme un classique instantané. On perçoit ici la classe de Sonic Youth, les mélodies envoûtantes de Cocteau Twins ou de Mazzy Star, la poésie shoegaze de My Bloody Valentine, ou bien encore la noirceur de Codéine. Hypnotisant et romantique à la fois, le jeune trio nous conte avec une sensibilité accrue les premières rencontres et les ruptures qui s’en suivent, les amours non partagés, ainsi que ce sentiment éternel de solitude à travers le désir (ou la crainte) d’être seul.
Les paroles s’envolent, les écrits restent, et c’est parfois un peu la même chose en musique. Nul ne peut donc savoir si bar italia se fera à long terme une place dans les esprits, ou bien s’il tombera aussi rapidement dans l’oubli qu’il est arrivé à nos oreilles. Mais une chose est certaine : Tracey Denim est une petite pépite brute qui pourrait s’inscrire éternellement dans le temps.
A ECOUTER EN PRIORITE
Nurse! , Missus Morality, Changer, Horsey Girl Rider, Clark, Friends, Maddington
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