Bajram Bili – ‘Detuning Euphoria’

Bajram Bili – ‘Detuning Euphoria’

Album / Le Turc Mécanique / 19.03.2021
Electro

Bajram Bili signe enfin un tournant musical important après avoir sillonné en long et en large de nombreux itinéraires techno. Reconnu pour ses sets, comme pour ses productions mécaniques, rythmiques, parfois teintées de lignes acid ou de deep, Adrien Gachet fait partie de ces spationautes ayant plus d’un tour dans leur sac. Surprenant dans sa façon d’user de la boucle et de la reverb avec ingéniosité, on l’a souvent repéré et apprécié pour son identité techno-analogique, qui s’est confirmée lorsqu’il lâcha sa guitare – son instrument fétiche – sur son premier album Sequenced Fog (2013, Another Record).  Ce n’est que plus tard, en 2017 avec Remembered Waves, que sa transformation résolument techno et ses ambiances sulfureuses marquent les esprits.

Bajram Bili poursuit aujourd’hui son parcours avec simplicité, humilité et sérieux dans son exploration sonore. Detuning Euphoria plante le décor en fermant une porte à la techno d’antan, pour ouvrir un nouveau portail électronique, tourné vers la réappropriation du piano, l’un des socles fondamentaux de sa musique. En ressort un album empli de textures formant progressivement une fresque à l’allure cinématographique. De nombreuses lueurs et paysages s’entrechoquent, pour un résultat intimement personnel. Il invite les auditeurs à se balader dans une aventure musicale où diverses jonctions digitales s’entendent sur un rythme décalé. Bajram Bili raconte habilement un état de phase ensorcelant où l’euphorie musicale surgit au travers de multiples détonations sonores et transversales. Un album aux transitions renversantes, mélodies synthétisées et un univers teinté d’électro futurisme.

L’entame Piano Chantal nous plonge dans un extrait de jeu vidéo. Un monde ouvert où l’on est transporté brusquement dans diverses atmosphères. On survole le ciel, puis on chute mystérieusement dans la brume. L’artiste titille nos sens avec élégance via de doux vocaux aériens, piano chantant et beats breakés. Un semblant de premier épisode où le suspens plane sur l’aventure à suivre. L’ambiance devient plus survoltée avec Fed by Waterfalls qui nous fait accélérer le pas en mitraillant l’auditeur à coup de jets de lasers perçants, alternés par des mélodies entraînantes aux échos tumultueux. Bajram Bili nous emporte dans les méandres d’une cascade bien étrange.

La progression de l’album est minutieuse, les sonorités du départ sont conservées mais modifiées au fur et à mesure. Les rythmes et chants deviennent plus saccadés, les notes rebondissent et font écho à notre mental. Les textures se mélangent puis fusionnent avec Parcours pour plus d’intensité. Comme essoufflé, l’artiste ralentit le pas avec volupté sur 17.17 qui nous enveloppe tendrement sur des souffles vaporeux et lumineux. On se laisse planer avec sérénité et euphorie sur cette pente musicale apaisante et enivrante, dénuée des sonorités saccadées entendues précédemment. L’ascenseur nous prend au corps, la douleur n’existe plus.

Avec une mélodie retentissant comme une alarme, Laundromat Spleen nous rappelle alors à la réalité. On se retrouve dans une spirale électronique aux sons aigus, immergés dans une mélancolie dansante, une valse répétitive qui présente bien cet effet de ‘machine à laver’. Un avertissement musical intéressant avant que When I Finally Understood clôture l’album avec intensité. Le rythme nous rentre dans la peau, nous place entre excitation du danger de cette course effrénée, et fascination pour un paysage fascinant et séduisant, imaginé par les douces mélodies d’un Bajram Bili comme lové dans un univers rétro-futuriste, inondé d’une nouvelle lumière.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Piano Chantal, 17:17, When I Finally Understood


Pas de commentaire

Poster un commentaire