15 Mar 24 Karkara – ‘All Is Dust’
Album / Le Cèpe – Exag – Stolen Body / 22.03.2024
Space rock
Que s’est-il passé à Toulouse à l’aube de ce troisième millénaire ? Les hangars de l’Aérospatiale ont gagné en influence sur les pierres roses des Carmes ou de Saint Sernin. La verve de Claude Nougaro et de Zebda a été engloutie par le rock cosmique de Slift et Karkara, broyée dans un champ de météorites. Si les premiers, qui ont traversé l’Atlantique pour sortir un quatrième album chez Sub Pop début 2024, ne sont plus à présenter, les seconds ont, pour l’instant, jouit de moins d’exposition. Karkara est un trio formé en 2019 à Toulouse donc, et composé de Kérim Rihani (guitare/chant), Hugo Olive (basse/synthé) et Maxime Marouani (batterie/chant). La musique qu’ils produisent entraîne forcément la comparaison avec leurs colossaux voisins. Il y a plusieurs façons d’appréhender la chose : on peut craindre de rester dans l’ombre pour au moins une année lumière ou alors profiter de lignes tracées, Karkara assurera d’ailleurs la première partie de Slift sur quelques dates de la tournée Ilion. Mais c’est encore une autre voie qu’ils ont suivie jusque-là : la leur, en sortant leurs deux premiers albums sur le label anglais Stolen Body Records et en parcourant l’Europe pour une centaine de concerts depuis leur formation. Aujourd’hui, Karkara sort All Is Dust, un troisième effort coproduit par Exag, Le Cèpe et Stolen Body.
Le disque se présente comme une odyssée avec de folles et longues échappées, pleines d’espoir ou remplies de douleur. Dans les tempos les plus élevés, l’influence de King Gizzard and the Lizzard Wizard ressort. Par ces motifs qui ont quelque chose de presque oriental, on pourrait être sur Tatooine comme en Anatolie. Puis un saxophone lugubre retentit et la voix devient traînante, comme celle de feu Layne Staley, en même temps que le rythme s’alourdit sur On Edge. Moonshiner offre une parenthèse plus luxuriante, illuminée par des nappes de synthés, alors que l’impressionnant Anthropia voit le groupe donner ce qu’il a de meilleur, un refrain entêtant arrive après une introduction tendue. Evidemment, ce genre de morceau se joue sur la longueur, comme la plupart de ceux de cet album d’ailleurs, et l’intensité finit par atteindre un niveau proche de la rupture.
Il y a toute une histoire de science fiction liée à ces morceaux, la quête d’un endroit meilleur suite à l’effondrement du monde : voilà qui mériterait un film d’animation. Et la conclusion est dans le titre : ce n’était qu’une illusion, la déception est au bout du chemin. All is Dust est aussi la dernière plage de ce disque, mais aussi la plus violente et chaotique. La voix mélodieuse laisse place à des hurlements, puis des cuivres de mariachis – dont on se demande s’ils sont bien réels – semblent symboliser la folie soudaine dont serait prise la victime du mirage. La route des Toulousains, elle, est toute tracée pour les mois à venir : elle ira de ville en ville pour défendre cet album, qui devrait prendre une autre ampleur encore en live.
A ECOUTER EN PRIORITE
The Chase, Moonshiner, Anthropia
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