Arthur Satan – ‘A Journey That Never Was’

Arthur Satan – ‘A Journey That Never Was’

Album / Born Bad / 04.04.2025
Pop rock psyché

Son dernier album date de 2021 et, étant donné le talent du bonhomme, c’est peu de dire que l’attente fût longue avant de pouvoir écouter à nouveau Arthur Satan. Mais à toute chose malheur est bon, dit-on, puisque de ces quatre longues années de gestation sort à présent A Journey That Never Was, un double album dépassant tous les espoirs que l’on nourrissait à propos de la suite de la carrière musicale du Bordelais. Rendre compte en quelques lignes d’une heure de musique portée par une ambition peu commune, et traversée par une énergie et un souffle créateurs tout bonnement exceptionnels, est une véritable gageure : il faut prendre le temps – et c’est tant mieux d’ailleurs – pour appréhender comme il se doit la richesse et la subtilité mélodique de ces 17 nouveaux morceaux, autant de mondes formant pourtant un univers cohérent. So Far So Good, le premier album solo d’Arthur après avoir mis un terme à JCSatàn, était déjà très bon, mais ce ne sera pas lui faire injure que d’affirmer que le second évolue dans une toute autre catégorie. Quand, à chaque nouveau morceau écouté, on éprouve ce frisson d’excitation que la reconnaissance d’une belle mélodie procure, que l’on va de surprise en surprise sans jamais voir l’enthousiasme retomber et que, bien au contraire, on ne cesse d’être stupéfait par tous ces joyaux sertis avec un savoir-faire disparaissant derrière la grâce de son application, on serait bien tenté de dégainer le qualificatif de chef d’oeuvre.

A Journey That Never Was est une ode magnifique à la pop et au rock, épousant parfaitement leur classicisme pour mieux en faire ressortir la dimension éternelle. C’est un travail d’orfèvre remarquable, dont la finesse permet d’assurer ce parfait dosage entre complexité de l’instrumentation et glorieuse simplicité des refrains. Chaque titre est stylisé à la perfection, mais la sophistication des moyens mis en œuvre, si elle est bien artificielle, laisse pourtant s’épanouir une musique semblable à un élan naturel, garantissant à chaque instant un plaisir immédiat. Dès l’intro aux clavecins et aux choeurs mélancoliquement recueillis de The Death of a King, on s’aventure dans une contrée musicale dont les boussoles orientent invariablement vers les années soixante et soixante dix. The Killer, très rapidement, place très haut une barre que tous les autres morceaux après lui passeront d’ailleurs avec aisance : après un début trompeur, laissant croire à une déambulation rêveuse à la Robert Wyatt, un groove électrique addictif déferle, pas si éloigné d’un rock sudiste bien terrien et gorgé de rythm’n’blues, sur lequel s’élèveront des choeurs contemplant l’immensité du ciel. Le reste de ce voyage imaginaire sera un flot ininterrompu de petites merveilles toutes singulières mais se complétant pourtant de façon harmonieuse. Les ballades sont de la partie : A Cold Morning, fabuleuse, marqué par l’Abbey Road ou le White Album des Beatles ; My Valentine, splendide et émouvante, rappelant également le quatuor de Liverpool ainsi que les grandes heures des Beach Boys sur Sunflower ; To Please You All, plus plaintive et douloureuse mais métamorphosée, vers la fin, par son solo de guitare lancé vers les étoiles. Les morceaux plus rock’n’roll, lorgnant de façon gourmande vers le glam – comme Crucify Me, Glomosaurus Rex ou le très saturé mais pourtant ondoyant Son of the Atom, avec son impeccable refrain et ses riffs héroïques -, trouvent judicieusement leur place, assurant à l’album une dynamique sans faille. Entre ces deux extrêmes, des titres de l’entre-deux se situant avec une folle justesse dans le sillage des Fab Four, comme After The Night, Life Goes Wrong ou l’irrésistible Lovely Suzy.

A Journey That Never Was ne cache pas ses inspirations, mais il en capture l’essence avec tant de goût, d’élégance et d’intelligence que, loin d’être vintage, il s’impose comme profondément authentique et, paradoxalement, original. Dans un monde idéal, cet album d’une rare splendeur bénéficierait d’une reconnaissance universelle. Dans le monde de fous qui est le nôtre, quelle sera sa destinée ? Au moins celle de nous rappeler que c’est la recherche de la beauté qui nous sauvera tous ; Arthur Satàn, dès lors, peut bien être notre messie.

Photo : Titouan Massé

VIDEO
ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
The Killer, A Cold Morning, My Valentine, Son Of The Atom

EN CONCERT

1 Commentaire
  • EricTR
    Posté à 12:38h, 14 avril Répondre

    certes cet album est bien fait, intéressant, de qualité , a bien assimilé ses différentes influences mais de là à se laisser aller à tant de dithyrambes,, l’exaltation du moment sans doute.

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