Andy Shauf – ‘The Neon Skyline’

Andy Shauf – ‘The Neon Skyline’

Album / Anti / 24.01.2020
Indie folk

Plus de trois ans après The Party qui a fait passer le canadien de la catégorie des songwriter talentueux à celle des génies hors-norme, The Neon Skyline était pour le moins attendu. Ici, la simplicité – pour ne pas dire l’épurement – est presque déstabilisante à la première écoute. Les cordes qui soutenaient le précédent disque sont absentes, et le piano bien moins présent. C’est donc un nouveau Andy Shauf qui se présente ici : rien d’étonnant tant les capacités de création du natif du Saskatchewan semblent illimitées.

L’univers est posé dès le premier titre. On se prépare à passer un moment dans le bar qui donne son nom à cet album inspiré par les soirées alcoolisées de son auteur accoudé au comptoir. L’enthousiasme d’une soirée pleine de promesses est décrit, et ce sentiment est instantanément partagé par l’auditeur prêt à s’associer à cette évadée. On aurait presque tendance à parler de cet opus comme d’un roman, d’un film, ou d’un recueil de nouvelles. C’est d’ailleurs son premier tour de force que d’arriver à magnifier le potentiel narratif d’un disque, que de parvenir à plonger l’auditeur dans un univers littéraire et musical, presque palpable, avec une telle proximité des protagonistes, dont Judy, ici figure centrale. On pense autant à Lived In Bars de Cat Power qu’aux descriptions de soirées dans les rades des romans de Virginie Despentes.

La seconde prouesse de The Neon Skyline est probablement d’ordre poétique, dans ses formules ou ses textes. ‘Charlie asked me if i believe / In reincarnation / I said no, but please go on‘, entend-on sur Dust Kids qui parle d’enfants ayant vécu des vies passées et qui nous fait littéralement décoller sur des considérations relatives à l’amour éternel. On est projeté dans les conversations, subtilement réécrites ou inventées par Andy Shauf; parfois proche du Haiku dans le caractère synthétique de certaines lignes, et dans leur simplicité troublante : ‘Rose is smoking a clove cigarette / And it’s bringing me back to your summer dress‘ avec ce timbre de voix et cet accent si singulier qui arrive à faire rimer cigarette et dress.

On ne peut être qu’envoûté par la ligne guitare-basse de Clove Cigarette qui a l’élégance et la pureté d’un couplet du Starman de Bowie. On retrouve aussi l’influence d’Eliott Smith, l’élève égalant le maître sur The Moon qui file systématiquement la chair de poule. Certaine voix ont – elles – ce côté magique assez inexplicable. Tout au long du disque, on a l’impression de passer une soirée entre potes devenant de plus en plus familiers au fil des titres.

La simplicité musicale, pas au sens de simpliste mais d’essentielle, ressort comme le coup de maître de The Neon Skyline. Alors qu’elles étaient magnifiées sur The Party, les fioritures sont désormais absentes chez le songwriter, pourtant l’un des plus grands arrangeurs folk de notre époque. Désireux de tout enregistrer lui-même (ce n’était pas le cas des cordes du précédent disque) afin de faire un album qui soit totalement le sien et qui reflète au mieux sa vision, sans compter l’enregistrement sur bandes qui l’a volontairement contraint à un plus grand dépouillement, le canadien a délibérément choisi de faire sans artifices. D’un bout à l’autre de sa petite histoire, jusqu’au final Changer au titre de circonstance, Andy Shauf parvient donc à conserver ce qu’il y avait de plus beau chez lui pour mieux se réinventer. Avec la plus belle des joies, celle des mélancoliques.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Clove Cigarette, Dust Kids, The Moon, Fire Truck


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