
22 Août 24 And So I Watch You From Afar – ‘Megafauna’
Album / Pelagic / 09.08.2024
Post math rock
Bien calés dans nos starting-blocks, nous nous tenions fin prêts depuis que le groupe nous l’avait annoncé l’an dernier : sept ans après The Endless Shimmering, And So I Watch You From Afar livre Megafauna, une nouvelle mouture venant enfin combler une trop longue attente que l’EP Arpanoid et Jettison (excellent mais s’apparentant plus à un projet parallèle) n’ont pas réussi à estomper. Et connaissant le niveau d’implication constant du quatuor dans sa musique depuis maintenant près de vingt ans, on pressentait un retour en (très) grande forme.
Les première notes pétillantes de l’entame North Coast Megafauna sont de bon augure et nous préparent déjà à replonger dans l’univers redoutable et unique en son genre des Irlandais, où succession de passages post-hardcore explosifs et d’ambiances apaisantes (virant psyché par moments) sont de rigueur. Une fois n’est pas coutume, on entend même le groupe inclure de gros riffs doom sur une trame progressive en toile de fond. La suite, tout en conservant une dynamique et une efficacité propres à la scène punk, est tout aussi savoureuse avec son lot de plans math-rock classieux lorgnant vers leurs compatriotes de The Redneck Manifesto (Mother Belfast (Part 1), Years Ago), de digressions électrisantes rappelant King Crimson (Do Mór) voire Radiohead (Any Joy), ou de moments de rêverie enivrants proches de Grizzly Bear (Do Mór). Rien de franchement étonnant quand on sait que Robert Fripp, Jonny Greenwood, Daniel Rossen ou Omar Rodriguez Lopez comptent parmi les influences majeures de Rory Friers et Niall Kennedy, les deux guitaristes de la bande, toujours aussi affutés et précis dans leur mode d’interaction – où le concept d’assignation de guitares lead et rythmique semble complètement désuet – comme dans l’impressionnante maîtrise de leurs textures parfois très expérimentales. La section rythmique – qui comprend à présent Ewen Friers, le frère de Rory, à la basse – est, elle, toujours solide comme un roc et permet d’encaisser pleinement les mélodies angulaires, les changements de rythmes abrupts et autres ‘starts & stops’ fréquents. En sus de ces morceaux toujours aussi complexes qu’excitants et émouvants, les quatre amis ont eu la bonne idée d’impliquer par endroits le quatuor à cordes et le pianiste déjà présents sur Jettison, avec pour effet de renforcer le côté cinématographique de certains titres, Any Joy en tête.
Avec ce nouvel album, And So I Watch You From Afar a, de son propre aveu, souhaité écrire une lettre d’amour à sa ville natale de Portrush sur la côte nord-irlandaise et au ‘cœur battant’ qu’est Belfast, avec en parfaite illustration le clip de North Coast Megafauna, à la fois magnifique et original. Après plusieurs écoutes, cette intention initiale devient non seulement palpable, mais Megafauna finit aussi par s’inscrire comme l’album le mieux produit, le plus abouti, le plus créatif et le mieux arrangé des irlandais. Leur plus belle oeuvre en somme.
Photo : Tom McGeehan
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