All Hands Make Light – ‘Darling The Dawn’

All Hands Make Light – ‘Darling The Dawn’

Album / Constellation / 21.04.2023
Post rock – shoegaze

Dans la catégorie des titres et des visuels qui ne trompent pas, voilà un disque qui tient haut la barre. De son dessin enfantin signé Michele Fiedler Fuentes – un soleil kaléidoscopique surplombant deux lapins aux étranges desseins – subsiste dans la musique les lignes claires, les questions laissées par le vide les entourant et un apparent minimalisme doublé toujours d’une imagerie mystique à la dimension symbolique. Formé par Efrim Menuck (Godspeed You! Black Emperor, A Silver Mt. Zion) et Ariel Engle (La Force, Broken Social Scene), All Hands Make Light réunit donc deux légendes de la scène alternative de Montréal pour un album étincelant, lumineux et méditatif. Faisant suite à la publication d’un premier essai autoproduit resté volontairement très confidentiel il y a maintenant deux ans, “Darling The Dawn” (avec ses guillemets anglais) s’incarne lui sous la forme de sept morceaux, parfois plus segments qu’entités propres, allant de trois à dix minutes pour nous conter un voyage résolument solaire.

De son entrée en matière à la façon d’un éveil sous de doux rayons (A Sparrows’ Lift), à des ondées lumineuses suscitant l’éclosion baignées d’une tendre mélancolie aux larges touches d’espoir (We Live On A Fucking Planet And Baby That’s The Sun), l’astre roi est partout. Il réchauffe, aveugle, brûle, calcine. De l’abstraction (The Sons and Daughters of Poor Eternal et ses cinq minutes d’introduction aux allures de drone krautrock) aux mélodies et progressions harmoniques qui pourraient presque virer à la pop song (Waiting For The Light To Quit), la production éthérée nimbe de ses teintes diaphanes les psalmodies stellaires des deux artistes, et ce même lorsque la pulsation se fait plus perceptible et obstinée (A Worker’s Graveyard (Poor Eternal)). Clôturé par le dyptique Anchor/Lie Down In Roses Dear, le voyage se fait légèrement plus ténébreux et menaçant dans son ultime partie. Avec sa sirène lancinante, sa dimension presque liturgique dans ses agrégats sonores et ses intentions métaphoriques, il rappelle ainsi, dans une toute autre sphère, les derniers travaux de Nick Cave et Warren Ellis. Entre nappes électroniques, modulaires ou synthétiques, et percées plus acoustiques, vocales ou orchestrales, ce sont bien ici deux univers singuliers qui se rencontrent, s’unissent et se fondent l’un dans l’autre. Mais au-delà du duo (crédité sous la simple division voix/noise), c’est aussi une aventure collective puisque l’on remarquera la participation de Jessica Moss au violon, celle de Liam O’Neill (Suuns) à la batterie, le mixage consciencieux de Jace Lasek (The Besnard Lake) et le mastering réalisé par Harris Newman. Une dimension qui irradie tout l’album, ne serait-ce que par la complexité de ses couches et la pluralité de ses timbres.

A l’image de Carol, chimère dévorée par la dépression qui craignait de ne plus jamais voir le soleil se lever dans le Max et les Maximonstres de Spike Jonze, All Hands Make Light joue sur nos états d’âmes et nos craintes profondes pour nous assurer pourtant que celui-ci ne disparaîtra pas de sitôt. Et nous rappelle ainsi, par la même occasion, la chance que nous avons d’assister à des aubes plus qu’à des crépuscules sur cette familière planète qu’est le label Constellation, source d’espoir et de lumière depuis maintenant plus de vingt cinq ans.

ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
A Sparrows’ Lift, We Live On A Fucking Planet And Baby That’s The Sun, Anchor


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