
04 Déc 20 Alex Maas – ‘Luca’
Album / Innovative Leisure / 04.12.2020
Folk rock
Il n’est pas possible d’aborder ce premier album solo d’Alex Maas sans d’abord considérer son parcours au sein de The Black Angels, fer de lance de la scène indé américaine cristallisant les maux d’une société malade par un psychédélisme épais et volontiers sombre. Les inégalités, les armes, les guerres. Ils auraient produit une formidable bande-son à un grand film sur le conflit irakien si quelqu’un avait pris la peine de le réaliser. Mais aujourd’hui, qui s’en soucie ? A part les milliers de vétérans qui en cauchemardent toutes les nuits ? D’autres guerres ont suivi, on ne sait plus où. D’autres groupes ont éclos, on ne se rappelle pas de tous. Les années 2000, George W. Bush, Passover ou Direction to See a Ghost appartiennent à un passé qui n’est pas encore l’Histoire. Mais un jour viendra. Alex Mass apportait sa voix pleine d’humanité. Aujourd’hui, il revient avec un premier album solo, Luca, et c’est comme si on avait des nouvelles d’un ami qu’on n’avait pas vu depuis des lustres, alors que les Black Angels avaient sorti un album tout à fait correct en 2017.
Luca, c’est le nom de son fils né en 2018, et son nouveau statut de père a quelque peu changé sa vision des choses, entre bonheur et craintes pour l’avenir. Un état d’esprit qui se reflète forcément dans cet album. Il lui chante des berceuses, le regarde et se sent Special, lui parle des 500 Dreams qu’il poursuivra durant sa vie, non sans une certaine mélancolie. Un spleen tenace parcourt le disque. La ballade This Light That Will End Us est très belle avec son accompagnement de violon, mais profondément triste. Alex Maas y dit qu’on est toujours attiré par ce qui brille à l’horizon, et que ça nous empêche de voir le crotale à nos pieds …
Alors, cette paternité n’apporterait-elle pas un peu de joie à l’homme à la casquette ? Le premier extrait Been Struggling en était un pur moment, le seul où notre homme se laisse aller dans une ballade folk bucolique qui prend une ampleur magnifique. Mais ça s’arrête là. Est-ce par pudeur ou l’anxiété a pris chez lui le dessus sur tout sentiment positif ? La réponse lui appartient, mais toujours est-il que l’album s’en ressent. Un morceau fragile et introspectif comme What Would I Tell Your Mother ferait son effet à la suite de morceaux plus électriques, mais ici, il participe au manque de consistance musicale du tout. Pourtant, Luca a été enregistré avec des musiciens expérimentés de la scène indé, et des membres du studio de Jack White.
Tout parent responsable se pose des questions sur le monde dans lequel nos enfants vont grandir. On peut aussi se dire qu’ils le rendront peut être meilleur. Alex Maas nous transmet ses angoisses par sa voix qui n’a peut-être jamais été aussi touchante. On note même un titre acide sur le final qui pourrait figurer sur un album des Black Angels, American Conquest est une balle de pistolet qui traverse un pays meurtri par les fusillades et les meurtres de masse, notamment dans les écoles. On ressort de ce disque avec des impressions mitigées. S’il n’est pas parfait, son écriture est pleine d’une sincérité saisissante. Et Alex Maas n’est pas venu nous mettre du baume au cœur.
A ECOUTER EN PRIORITE
Been Struggling, This Light that will End Us, 500 Dreams
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