Aesop Rock – ‘Spirit World Field Guide’

Aesop Rock – ‘Spirit World Field Guide’

Album / Rhymesayers / 13.11.2020
Hip hop psychédélique

Bien calé sur son petit rythme de croisière d’un album tous les quatre ans, Aesop Rock délaisse momentanément les collaborations et les musiques de films ou de jeux vidéo pour venir nourrir sa discographie officielle avec le conceptuel Spirit World Field Guide, taillé pour le voir reprendre un peu d’avance sur une concurrence qui n’a toujours pas refait son retard. Pour cela, cette figure de l’underground new yorkais n’a pas fait dans la demi mesure en alignant une vingtaine de titres, s’écartant ainsi de la tendance des disques aussi vite oubliés que consommés.

Désormais reconnu jusque parmi ses ainés (LL Cool J l’encensait encore récemment sur Twitter), celui qui fut élu il y a peu comme le MC au vocabulaire le plus riche invite ceux ‘se sentant à la fois mort et vivant‘ à survivre dans un entre-deux-mondes ou tout prend vie, des personnages aux objets en passant par les animaux. La mémoire débordante et la langue bien pendue, Aesop Rock déroule ainsi le fruit de son inspiration tout au long d’un album ou, à l’instar des deux derniers, ne figure aucun featuring. C’est donc seul qu’il se lance dans une série de contes surnaturels et de récits surréalistes, ponctués d’expériences vécues, et portés par un flow aiguisé comme une lame, d’une précision toujours aussi dingue.

Pour enrober le tout d’une cohérence parfaitement pensée, Matthias Bavitz (son vrai nom) reste fidèle à sa marque de fabrique singulière et avant gardiste, à l’oeuvre depuis qu’il a pris ses distances avec le producteur Blockhead pour Skelethon (2012). En signant la grande majorité des productions de ce huitième album (seul Sleeper Car est produit par Hanni El Khatib et Leon Michels), il en fait une oeuvre complète, totalement raccord avec l’artiste solide et complet qu’il est désormais. Ainsi, comme des reflets de ses histoires drôles et capilotractées, Aesop Rock fond régulièrement des synthés lasers psychédéliques et des guitares fuzz dans des ambiances sci-fi et groovy (Gauze, Coveralls, Holy Waterfall, Salt, Attaboy, The Four Winds) pour finalement s’élever jusqu’à atteindre des hauteurs inégalées chez lui.

Peu surprenant pour le fan qui le suit depuis ses débuts (Float, son premier album, a 20 ans cette année), Aesop Rock s’applique surtout ici à conforter son talent, et à rappeler par les faits – et sans élitisme – que le hip hop le plus fin n’est pas celui vendu par les radios ou les playlists les plus écoutées de votre plateforme préférée. Entre l’expérimental et des basiques qu’il s’amuse à gentiment bousculer, le Mc/producteur oscille lui aussi depuis toujours au sein d’un monde parallèle qui semble parfaitement lui convenir. Pas étonnant donc que, avec un pied de chaque côté du fossé, il soit le mieux placé pour raconter ce qu’il s’y passe. On finirait presque par le croire sur parole.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Button Masher, Boot Soup, Gauze, Coveralls, Attaboy, The Four Winds


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