On y était ! Retour sur le Festival Hop Pop Hop 2017

On y était ! Retour sur le Festival Hop Pop Hop 2017

A l’embouchure du dernier carrefour des festivals d’été, on a pris le bus (parce que même à la moitié du mois, c’est dur) pour aller du côté d’Orléans, au Festival Hop Pop Hop. Un événement à qui on reconnaît déjà d’avoir eu le bon goût de ne pas claquer toutes ses subventions dans une reformation histoire de racoler les quadras. Ou pire, de convoquer toute la jeune variet’ à la papa – The Pirouettes, Juliette Armanet… – pour la jouer cool auprès du public CSP+ (vous savez, ces vieux-jeunes qui mélangent veste de costume et Stan Smith et qui parle en plus de ‘disruption’).

Parce que la programmation du Hop Pop Hop, elle, aligne les découvertes avec un sens de l’horizontalité parfait. Aucun groupe ne vient asseoir son cul sur un autre et la moyenne d’âge des forces en présence n’excède par les 30 ans. Une raison suffisante pour aller se mettre au vert en région Centre, dans le flot continu des concerts du mois de septembre.

Confirmant tout le grand bien qu’on pensait déjà d’eux, les Montréalais de Corridor (photo ci-dessous) – sortes de Real Estate, mais en VF et en mille fois plus excitants – ont ouvert le festival avec leur pop lumineuse et accidentée. Quelques vannes, des sourires et un ‘Coup d’épée’ joué avec l’assurance de ceux qui s’avancent sûrs de leurs armes suffiront à conquérir le public, plutôt distant et clairsemé jusque-là. On s’échappe à contrecœur avant la fin, pour rejoindre BRNS pour une interview. Eh oui, le groupe belge s’apprête à sortir son nouvel album après le très réussi ‘Patines’ (2014) et on avait bien envie d’en discuter avec eux. On vous épargne les détails, d’autant que vous retrouverez l’interview complète très vite sur le site.

Plus de tristesse que de modernité ensuite au show de Tristesse Contemporaine, qui confirme qu’un emballage arty ne donne pas forcément sur le fond de bons morceaux et encore moins un bon concert. Creux, geignant en permanence de ne pas voir le public réagir (palme du gros bébé chouineur), le groupe électro-pop donne au moins l’opportunité d’aller s’approvisionner au bar sans attendre. Il en faut toujours des groupes comme ça.

Originaire de Los Angeles, The Buttertones ‘croone, rhythm’n’blues, rockabilly, surf rock, garage et doo-wop’ nous apprend le programme du festival. Mais ça ne nous explique toujours pas pourquoi des gars de 20 piges continuent de se saper et de jouer de la musique comme si les années 60 ne s’étaient jamais terminées. On n’obtiendra d’ailleurs pas la réponse, même s’il faut bien l’avouer, ces gars-là savent écrire des titres qui visent juste, avec ce qu’il faut d’énergie et de savoir-faire pour intégrer du saxophone à leurs envolées garage.

Montée de sève encore avec B Boys, qu’on ne connaissait pas deux heures plus tôt mais que BRNS nous a conseillé d’aller voir. Et honnêtement, on n’est pas déçu du voyage. Imaginez si Wire, plutôt qu’en Angleterre, était né aux USA dans les années 90 avec pour père putatif David Byrne. Vous voyez ? Ça joue tendu, précis avec un son rêche mais ça s’octroie quand même le droit de jouer aux gogols cryptiques entre les morceaux. Bingo.

22h30 et BRNS recompose l’un de ses shows aux allures de grande profession de foi. Impeccable tout du long malgré la pluie, on se rappelle pourquoi on était tombé amoureux d’eux dès leur premier EP. Sans en avoir l’air, ils façonnent une pop pleine de reliefs mais capable de frapper droit aux tripes en public surtout grâce à la puissance du batteur/chanteur Tim Philippe. On file ensuite voir le Prince Harry histoire de se prendre quelques mandales dans la gueule pour finir la soirée en beauté. Avec son proto-punk synthétique, le duo réussit même l’exploit de déclencher quelques pogos et des stage-diving en série dans la petite cour du 108. Il était temps de se chauffer un peu, Orléans.

Le lendemain, les Anglais d’Ulrika Spacek ouvrent la journée avec leur pop-krautrock-psyché-shoegaze-mettez-y-ce-que-vous-voulez. Comme à son habitude, le groupe déroule placidement ses titres de haute tenue devant une audience pourtant bien restreinte. La faute à l’heure (17h), peu à même de rassembler et rendre justice à des morceaux aussi tortueux. Pas le temps non plus de s’en émouvoir puisque sur la petite scène du 108, YachtClub s’apprête à perdre les familles en présence dans son flot épileptique et dadaïste. Sans doute trop appliqués, les Tourangeaux finissent par lâcher la bride avec leur tube ‘Tchitty Tchatty Saloon’, aussi ravageur sur scène que sur disque. Un sacré bordel, pire encore que les choix vestimentaires du groupe.

Toujours aussi habitée aussi, la voix de Loïc Le Cam résonne déjà pleine balle lorsqu’on retrouve la formation nanto-brestoise en concert dans le jardin de l’évêché. Rien à dire encore une fois sur ces titres amples dont on vous a déjà dit beaucoup de bien, et dont la puissance de feu résonne encore mieux sur scène avec ses guitares orageuses. Peut-être moins concerné que d’habitude, on se tape quand même quelques frissons sur ‘Beds’, ‘Deft Hands’ et le grand final ‘Leopard Print Wife Beater’.

Des frissons, de l’émotion, ou simplement l’envie de remuer un peu : des phénomènes quasi-absents devant OMNI. Formé par Frankie Broyles, ex-membre de Deerhunter, le jeune trio originaire d’Atlanta joue sa pop lo-fi comme on récitait de notre côté la poésie du lundi matin face à Mr. Séchet en CM2 B. C’est bien appris, hein, mais faudra y mettre un peu plus de foi la prochaine fois. Heureusement, dans la série ‘la Belgique arrive pour botter des culs’, on retrouve rapidement Cocaïne Piss (photo ci-dessus) sur la scène du 108. Avec un programme aussi limpide que son nom, le groupe liégeois plie l’affaire en 20 minutes. Ça joue vite, sans temps mort, agressif, avec la partition théâtrale d’Aurélie Poppins, la chanteuse. Le public gueule, on compte les bleus, le match est plié.

Autre ambiance après devant Rubin Steiner, qu’on ne présente plus vraiment (sinon sa page Wikipedia le fait très bien). Avec en tête le seul plaisir du beau jeu, le DJ brille dans ses envolées dance/house. Si bien qu’on se demande pourquoi placer tout du long de sa performance des visuels avec du texte, qui forcément tendent à rendre le public spectateur et non plus partie prenante. De notre côté, on a préféré fermer les yeux et se laisser happer par ses boucles hypnotiques.

Dernière doublette de concerts avant que l’alcool ne finisse par nous entraîner dans les vertiges de l’oubli : d’abord Fews (photo ci-dessus). On était un peu passé à côté du premier album sorti en 2016 de ces jeunes gens venus de Suède. Disons, que loin d’être honteux, il s’inscrivait dans 80 % des productions indie-rock actuelles : beaucoup trop de réverb’, pas assez de vrais morceaux, pas beaucoup de choses à raconter. Mais sur scène, l’affaire est tout autre. Plus tendue, plus déviante et plus consistante, la bande désormais installée à Londres fait vriller les têtes jusqu’à l’impeccable final ‘III’, shoot d’adrénaline qui s’étire jusqu’à disparaître dans un nuage saturé. Et de la saturation, il en sera beaucoup question avec C_C. Sorte de techno-noise où le bruit blanc est une matière à triturer jusqu’au seuil de la douleur, la musique du producteur Eduardo Ribuyo invite à la transe autant qu’à l’extase. Une conclusion digne de cette programmation de la seconde édition de Hop Pop Hop, qui prolonge un peu l’été, même à Orléans, même sous la pluie.

Photos : Adrien Guitton & Anthony Kwan Chung


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