At The Drive In, une légende à emporter

At The Drive In, une légende à emporter

Pour At The Drive In, venir d’El Paso, petite ville du Texas, n’était pas forcément une chance au départ. Pourtant, tout pousse à croire que ce boulet à la cheville aura donné envie au groupe de se surpasser pour s’en éloigner au maximum. Si possible par le biais de la musique.

Remontons en 1994: ATDI sort « Hell Paso », son premier 45 t en autoproduction, qui lui permettra de parcourir le Texas en large et en travers, pour enchaîner l’année suivante avec « Alfaro Vive, Carajo », qui marquera une première tournée nationale. Le quintet commence à faire parler de lui, à accumuler les rencontres dont celle de Blaze James, membre du label Flipside, qui verra pour la première fois le groupe dans un petit bar de Los Angeles devant neuf personnes. Le bonhomme craque et propose à At The Drive In de sortir leur premier album, « Acrobatic Tenement ». De là, tout s’accélère: changements de line up (Omar passera notamment de la basse à la guitare) et tournées de plus en plus longues. Après un mois de repos, les texans reprennent la route du studio en septembre 1997 et sortent « El Gran Orgo » sur Offtime, six titres déballant un aspect plus mélodique du groupe mais également un plus grand pouvoir émotionnel.

Alors que la formation voit son public s’élargir, ses deux premiers labels battre de l’aile, il décide de démarcher le maximum de labels indépendants américains. Sans réponse. La chance viendra pourtant sortir At The Drive In d’un avenir incertain, lorsque les boss de Fearless assisteront à un de ses concerts dans un bar en première partie de Supernova. Le quintet craindra alors de ne pas correspondre au catalogue hardcore mélodique du label, mais la confiance fera le reste, d’autant que le label est sous le charme. C’est donc en juin 1998 que « In/Casino/Out » sera bouclé en six jours avec Alex Newport derrière les manettes. Là, l’évolution est grande: l’album marque une plus grande maturité et l’énergie est enfin retransmise sur bande, et pour cause, puisque cet opus a été enregistré en studio dans des conditions live. At The Drive In vivra alors sur la route, enchainant les concerts de juin à décembre de cette même année, partageant la scène avec Good Riddance, Knapsack, The Murder City Devils, Fugazi, Archers Of Loaf, ou Jimmy Eat World. Après un repos de trois mois à la maison passés à enregistrer quelques nouveaux titres, le groupe repart à travers les Etats-Unis et se rend pour la première fois en Europe pour une tournée de six semaines.

Les texans lèvent alors un peu le pied, ne participant qu’à quelques concerts et festivals leur permettant de fouler quelques unes des plus grandes scènes de Californie. « In/Casino/Out » fête quasiment son premier anniversaire et ils décident de sortir un nouveau long maxi, toujours sur Fearless. « Vaya » sortira le 13 juillet 1999 et illustrera la puissance et la délicatesse de composition du groupe. Suivent quelques dates avec Bluetip aux USA lors desquelles le combo rencontrera le label DEN désormais sur les plaquettes. Il est donc déjà temps de penser à un nouveau véritable opus. Alors que Cedric et sa bande se penchent sérieusement dessus, ils sont invités à tourner avec les Get Up Kids pendant trois semaines et donnent des concerts sans précédent qui resteront dans beaucoup de mémoires. De passage à New York notamment, ils profitent de leur rencontre avec Ross Robinson, dont ils apprécieront la méthode, pour enregistrer un titre sous sa houlette (« Catacomb »). De là, le choix du prochain producteur ne sera pas long.

Les aubaines s’enchaînent miraculeusement et l’enregistrement est retardé: voici que Rage Against The Machine invite le groupe à ouvrir pour lui pendant deux semaines. Refus impossible, d’autant qu’At The Drive In revient d’une tournée dans les mêmes villes qui ne contraindra pas ses fans à venir les voir dans des stades ou autres endroits sans véritable intimité. Il faudra donc attendre le 17 janvier 2000 pour que le combo entre pour de bon en studio, pendant sept semaines avec Ross Robinson, qui poussera chacun des musiciens dans ses derniers retranchements pour tirer le meilleur d’eux-mêmes. Sur « Relationship Of Command », sortant le 12 septembre suivant, At The Drive In repousse encore plus loin les limites, pond un album inégalable et apprend par chance que le label DEN s’associe avec Grand Royal, structure des Beastie Boys.

La bonne étoile est toujours là. Le monde tend alors les bras aux texans, qui parcoureront le Japon, l’Europe et draineront à chaque date une nouvelle salve de fanatiques. ATDI est alors considéré comme la révélation rock du moment, multiplie considérablement ses ventes d’album comme les concerts et commence à ressentir une certaine pression. C’est donc le 28 mars 2001 qu’on apprend sur le site internet du groupe sa décision de faire une pause de quelques mois, qu’on présage tout de suite de mauvaise augure, confirmée quelques semaines plus tard par l’apparition de side projects de plus en plus affirmés (Defacto, Sparta, The Mars Volta) laissant notre doux rêve de reformation à l’abandon. Reste alors un goût d’inachevé, quelque chose qui nous pousse à croire qu’on tenait là une nouvelle légende, celle qui a ouvert les portes d’un large public à un rock tendu et de prime abord peu accessible. Le plus dur était fait, telle est peut être la raison de ce retrait que beaucoup regretteront encore longtemps.

Lire la chronique de « This Station Is Non Operational »


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