Le hardcore des années 2020 ne se résume pas à Turnstile

Le hardcore des années 2020 ne se résume pas à Turnstile

Si le moshpit et son lot de spin kicks, de roues et de two-step font partie de ta routine pour garder une forme olympique, tu n’as probablement pas attendu l’album Glow On de Turnstile pour vivre ta meilleure fast life hardcore. Difficile cependant de nier le récent impact stratosphérique qu’a eu ce disque sur le genre. Le hardcore est-il devenu mainstream ? Si l’affirmer sans ambages serait faire slammer un peu trop vite mémé dans les orties, pas de doute qu’il n’est plus cantonné aux sous-sols humides. C’est un fait : le hardcore a désormais sa place assise à 65 € à l’Olympia, en première partie dans des stades, et dans des pubs télévisées pour la fast-food. Seulement, en parallèle et un peu plus dans l’ombre, certains groupes ont les coudées franches quand il s’agit d’expérimenter et de proposer une musique de plus en plus hybride ne versant plus uniquement dans le beatdown de sagouin. Oui, le hardcore ajoute désormais de l’eau à son moulin et de la pop aux moulinets ! Certains puristes crient à l’hérésie de voir leur scène s’ouvrir à un public de plus en plus jeune et nombreux, tandis que d’autres les accueillent à bras ouverts et laissent les plus radicaux régler leur compte dans la fosse ! Entre deux feux, Mowno dresse une liste 100 % objective et sans ordre particulier des dix meilleurs albums hardcore sortis depuis le début de la décennie, Turnstile exclu. Histoire de faire chier.

Photo header : Titouan Massé

SÉLECTION

SOUL GLO
Diaspora Problems

Imagine ta tête passée au cycle essorage de ton lave-linge et tu auras une idée de ton état à la fin de l’écoute de cet album : rincé ! Les Philadelphiens jouent chaque morceau à la vitesse d’un vaisseau spatial dans un film SF, tout en maniant aussi bien le punk old school, le hip-hop expérimental ou le ska sous crack. De plus, Pierce Jordan possède une des voix les plus identifiables du hardcore moderne, et un phrasé bien à lui quand il s’agit de scander des paroles politisées dénonçant le racisme et les violences policières. Musique extrême oui, musique extrême gauche plus encore.

KNOCKED LOOSE
You Won’t Go Before You’re Supposed To

Un épisode imprévisible de peur intense qui déclenche des symptômes physiques violents. La crise d’angoisse et Knocked Loose partagent la même définition. Mastodonte de la scène hardcore, d’autant plus depuis qu’il joue devant des milliers de personnes et qu’il cachetonne à Coachella, le groupe n’a pour autant fait aucun compromis en termes de brutalité sonore : les cinq te roulent dessus comme un Panzer. La voix de Bryan Garris est plus proche des aboiements d’un chien de garde que de la voix d’un homme, et le beat reggaeton de Suffocate est déjà rentré dans la légende.

MSPAINT
Post-American

Un groupe du Mississippi qui combine le punk, des synthés sauvages, de l’indus’, du nu métal et du hip-hop a, sur le papier, toutes les armes pour remporter le kamoulox hardcore ! Chaque morceau est un collage sonore indéniablement fun, avec juste ce qu’il faut de touche nostalgique pour ne pas basculer du côté rétro opportuniste. Il ne te reste plus qu’à ressortir ton skate, ton sac à dos EastPack flanqué de glorieux patchs et de rouler vers l’horizon, le cœur rempli d’optimisme à l’idée de rejoindre ton crush au parc.

GEL
Only Constant

Le hardcore reste une musique simple pour des gens simplets : on répète les riffs, la batterie se met en mode autoroute, on hurle à la lune et, dans la fosse, c’est la bagarre. GEL ne dévie pas de cette formule gagnante et associe énergie infatigable à de surprenantes mélodies pour, au final, être un des groupes émergents les plus excitants de cette scène. Mention spéciale aux performances vocales impeccables de Sami Kaiser dont le message positif ne tolère que les bonnes vibes et l’inclusivité.

SPEED
Only One Mode

Une seule écoute de cet album et tu te retrouves miraculeusement à faire du développé couché. Le charisme et l’aisance avec lesquels SPEED te prend par la main pour célébrer le genre hardcore et sa communauté expliquent sa conquête du monde, concert après concert. Aussi efficace qu’une quatrième pinte à l’apéro, et jusqu’au-boutiste dans sa simplicité, le groupe t’offre une cure de jouvence qui ne peut se solder que par un grand sourire éclairant ta face. Je suis aussi dans l’obligation contractuelle de mentionner QU’IL Y A UN PASSAGE DE FLÛTE DANS LE BREAKDOWN DE THE FIRST TEST.

GULCH
Impenetrable Cerebral Fortress

15 minutes de pur chaos en provenance de Californie : la brèche que ton voisin va prendre sans se faire prier pour appeler les autorités qui feront de toi un nouveau fiché S. Avec seulement une démo, deux Eps et un album à son actif, Gulch a grandement contribué au revival hardcore des années 2020 avant de splitter au pic de sa hype. On flirte ici avec le death, le black metal et le stoner et on reste toujours persuadé que le groupe a confié les parties de chant à un goret de passage au studio. Quelques-uns des tags utilisés pour caractériser ce disque : #mort, #anxiété, #dissonant… La bande-son idéale pour tes salutations matinales au soleil, en somme.

ZULU
A New Tomorrow

Du powerviolence dévastateur pour casser des tarins en retour de moulinet, marié à des influences funk, reggae et hip-hop ! Et si Zulu était la solution pour enfin assurer la paix dans le monde ? Sans franchir la barre des 30 minutes, le groupe propose une musique si dense et fouillée que chaque écoute révèle son lot de surprises et de breakdowns tellement scandaleux qu’ils te feront faire la grimace. Un disque qui célèbre aussi la communauté noire et qui emploie toute son énergie à honnir le racisme et le colonialisme. Spin kick ton nazi local.

SHOW ME THE BODY
Trouble The Water

Le trio New-yorkais ne plaît pas forcément aux Néandertaliens hardcoreux traînant les poings au sol et n’écoutant que du beatdown pur et dur, puisqu’il est enclin à expérimenter du côté du hip-hop, de la musique industrielle et de la noise électronique. Shit goes weird. Le refus d’une quelconque limitation à un genre ou un son – tout en étant immédiatement reconnaissable – a fait le succès plus qu’underground du groupe. Comme le fait que Julian Cashwan Pratt soit le frontman le plus intense et charismatique du hardcore alors qu’il joue du banjo.

SCOWL
How Flowers Grow

Un peu de douceur, d’influence pop et de voix claire n’a jamais tué personne, même au sein de la confrérie des zozos fans de cris gutturaux. Scowl se situe quelque part entre le punk de Turnstile et des groupes de hardcore plus rentre-dedans. Le fait de jouer sur les deux tableaux lui assure un cheptel de fans toujours plus nombreux qu’il ne manque pas de convertir à ce genre béni. L’entorse du doigt jamais guérie que se trimballe l’auteur de ces lignes depuis un de ses shows atteste également de son professionnalisme.

CANDY
It’s Inside You

L’impulsivité et l’agitation incessante d’une classe de maternelle, l’hyperactivité de l’hypercore et la testostérone d’Arnold Schwarzenegger dans Commando… Dans cet album, on trouve trente idées fabuleuses à la minute et l’exécution est colossale de sauvagerie. Candy a le chic pour dépoussiérer les clichés du hardcore et proposer des sons aussi peu communs que des neurones dans un moshpit. Tu peux même quasiment twerker sur les sons électroniques et trance pour devenir les rois/reines du dancefloor.


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