Les 100 disques de la décennie (Pt.1, 2010-2014)

Les 100 disques de la décennie (Pt.1, 2010-2014)

Relever le défi de sélectionner 100 disques marquants de la décennie 2010-2019 ? Et pourquoi pas ! Malgré ses airs d’usine à gaz, l’expérience s’est révélée passionnante et n’a pas manqué de réveiller quelques moments de nostalgie. Comment ne pas se souvenir de cet été 2011 où bon nombre d’entre nous ont certainement et inlassablement dansé sur les tubes du English Riviera de Metronomy ? Comment ne pas se souvenir de cette année 2012 qui aura vu Kevin Parker et son groupe Tame Impala révolutionner tout un pan de la musique psychédélique avec le majestueux Lonerism ? Comment réécouter Dolziger Str.2 des bordelais d’Odezenne sans se rappeler que ce disque est sorti un triste 13 novembre 2015 ? Comment analyser une œuvre aussi dense que Damn de Kendrick Lamar sans y établir des connections avec l’élection surprise de Donald Trump survenue quelques mois avant ?

Voici donc, non pas un classement, mais une sélection qui tâche de ratisser large pour représenter au mieux la diversité musicale, les sujets de société ainsi que les changements importants de notre époque. Partagée entre découvertes, évidences notables, et véritables coups de cœurs devenus finalement nos intemporels, cette sélection est notamment portée par un hip-hop superbement représenté, tant par ses inconditionnelles têtes d’affiches que par ses têtes chercheuses les plus radicales. Une sélection marquée également par le psychédélisme sous toutes ses formes, que ses penchants soient rock et acoustiques, expérimentaux et électroniques, ou bien portés sur le jazz. Durant toute cette décennie, nous avons aussi assisté à l’ébullition d’une scène française, qui n’a cessé d’afficher sa bonne santé et ses envies d’en découdre, comme ses envies de révolutionner la pop. La scène britannique n’est pas en reste non plus, elle qui a vu émerger ses dernière années une floppée de nouveaux groupes, ravivant ainsi la glorieuse flamme du rock 100% british. Une sélection qui n’oublie évidemment pas non plus la musique folk ou bien encore l’électronique et ses variantes techno. Et pour finir cette décennie qui fut aussi marquée par les affaires et la libération de la parole féminine, elle est ici représentée par quelques unes de ses plus emblématiques et talentueuses ambassadrices.

Cette sélection ne contentera évidemment pas tout le monde, les absents notables étant au moins aussi nombreux et importants que ceux sélectionnés. Mais il y en a pour tout le monde et pour tous les goûts au sein de cette liste subjective et chronologique, faite avec le cœur, la passion, et le déchirement de devoir trancher. Au fond, nous gardons l’intime et humble conviction qu’elle vous permettra de (re)découvrir certaines des œuvres qui ont marqué de leur empreinte cette décennie qui s’achève, et cela, avant de s’attaquer à la nouvelle que nous avons déjà hâte de découvrir et de partager avec vous.

DEERHUNTER
Halcyon Digest
4AD – 2010

Avec Halcyon Digest, Deerhunter penche ouvertement vers la pop, et le confirme avec un disque qui se laisse pour la première fois porter par de véritables tubes (Desire Lines, Memory Boy). La bande de Bradford Cox tente ici d’apporter subtilement au plus grand monde une approche de la musique qui lui est définitivement personnelle et singulière. Surement l’œuvre la plus complète du groupe.

WAVVES
King of the Beach
Fat Possum / Bella Union – 2010

King Of The Beach, c’est le disque qui fleure bon la plage, les chemises à carreaux et les packs de bières qu’on sifflerait devant des couchers de soleil. On perçoit ici les expérimentations psychédéliques de Panda Bear et les influences punk 90’s de Californie, comme si les Beach Boys s’aventuraient dans la musique grunge en lui rajoutant un joli vernis pop.

VENTURA
We Recruit
Africantape – 2010

Imaginez Sonic Youth, Helmet, et d’autres dignes représentants 90’s de l’indie et du grunge, venir respirer tous ensemble l’air de la montagne. Vous pourrez alors entamer l’ascension d’un album qui brûlera définitivement un peu de votre capacité auditive. Pour la bonne cause, car les suisses de Ventura atteignent ici les sommets avec une facilité déconcertante.

FOALS
Total Life Forever
Sub Pop – 2010

Exit les hits immédiats du premier album. Foals préfère laisser ici ses expérimentations rayonner au fil des écoutes, affichant ainsi son honnête ambition : faire avancer sa musique au gré de ses envies, sans autre considération que son seul épanouissement. Une exigence majeure saluée par les mélomanes, mais après laquelle Foals ne cessera de courir, comme dépassé par son propre succès.

THE NATIONAL
High Violet
4AD – 2010

A la hauteur de son colossal prédécesseur Boxer, High Violet demeurera certainement comme l’œuvre épique et lumineuse qui aura réussi à placer The National parmi les têtes d’affiche de notre époque. Un disque empreint de spleen et de mélancolie, où les guitares tortueuses se mêlent à des arrangements somptueux, passant ainsi de climats sombres et ténébreux à l’ensoleillement total.

SHIPPING NEWS
One Less Heartless to Fear
Africantape – 2010

Plus énergique, rapide et spontané que son prédécesseur, One Less Heartless To Fear vous agrippe à la gorge et la serre avec une force jusque là inégalée. Tête baissée, et ne se fiant qu’à son instinct, le quatuor fonce et vous gifle de la première à la dernière note comme saurait si bien le faire Shellac, ou vous découpe au scalpel lors de quelques soubresauts bruitistes à la manière de Slint.

FLYING LOTUS
Cosmogramma
Warp – 2010

En demeurant le chaînon manquant des musiques urbaines américaines et britanniques, et en jurant fidélité à ce subtil mélange de hip hop psyché, de soul et d’électronica bien colmaté par une approche improvisée héritée du jazz, Flying Lotus vient marquer l’histoire de la musique avec ce Cosmogramma délicieusement complexe, pensé jusque dans ses moindres recoins.

GONJASUFI
A Sufi & A Killer
Warp – 2010

Attention OVNI ! Rayez ici de votre mémoire tout ce que vous pensez savoir sur la musique. Sur ce premier album, Gonjasufi dépeint singulièrement un univers musical hallucinogène, à la fois urbain et aride, en tous points atypique et avant-gardiste. Au diable les étiquettes, le californien s’impose ici comme l’un des artistes les plus visionnaires et envoûtants de sa génération.

THE BLACK KEYS
Brothers
Nonesuch – 2010

Poussés et influencés par leurs récentes collaborations avec la crème du hip-hop américain, Dan Auerbach et Patrick Carney dévoilent ici leur nette intention d’intégrer du groove à leur musique. En privilégiant les lignes de basses et de claviers, Brothers se donne des allures de musique soul décomplexée sans pour autant mettre un terme aux pérégrinations rock du duo.

DEATH GRIPS
ExMilitary
Autoproduction – 2011

L’une des plus grosses gifles de la décennie est une mixtape. A tort d’ailleurs car Exmilitary pourrait être considéré comme le véritable premier album de Death Grips. Chef d’œuvre d’impertinence et d’apocalypse, l’album pioche chez Link Wray, Pink Floyd et My Bloody Valentine, et vient secouer un rap qui se montre parfois un peu trop mollasson. La déflagration sonore de 2011.

METRONOMY
The English Riviera
Because – 2011

Doux et langoureux, The English Riviera vous invite à vous asseoir dans un canapé moelleux face à la mer, pour y compter les vagues et respirer l’air iodé. Jamais précipité, le disque aligne avec un immense talent des perles pop imprégnées des mélodies, de la chaleur et du groove des 70’s. Un retour sous le signe d’une pop funky qui a appris à arrondir les angles pour gagner en profondeur.

SHABAZZ PALACES
Black Up
Sub Pop – 2011

Ingénieux et mélancolique, Shabazz Palaces fait écho aux formations les plus novatrices en alliant sa science de la musique répétitive et son talent pour chiner les bons samples. Le duo s’inspire notamment de Steve Reich et Robert Wyatt pour atteindre ici des sommets et troubler nos habitudes auditives. Un bijou entre textures d’aujourd’hui et fondamentaux jazz hip-hop plus traditionnels.

JULIANNA BARWICK
The Magic Place
Asthmatic Kitty – 2011

Album céleste, sensible et rêveur, The Magic Place est une superbe symphonie composée de nappes envoûtantes, de quelques notes de pianos discrets, et d’une multitude de superpositions vocales comme venues d’ailleurs. Penchant féminin de Panda Bear ou des doux hippies de Fleet Foxes, Julianna Barwick marque ici de son empreinte vocale une œuvre résolument unique.

PORTICO QUARTET
Portico Quartet
Real World – 2011

Loin d’une musique qui se voudrait élitiste et inaccessible, Portico Quartet délivre ici un jazz somptueux, sobre, fluide et enthousiasmant, où les expérimentations et l’improvisation se mêlent aux douceurs nocturnes de la musique électronique. Une œuvre à mi-chemin entre les expériences solo de Thom Yorke, la musique de Bonobo ou bien encore celle du Cinematic Orchestra.

BATTLES
Glass Drop
Warp – 2011

Après un excellent Mirrored paru en 2007, Battles a dû faire face au départ soudain de Tyondai Braxton dont beaucoup pensaient qu’il était la figure emblématique et le centre névralgique du groupe. C’était quelque peu sous-estimer l’immense talent des trois cerveaux restants qui, au final, accouchèrent ici d’un des disques expérimentaux les plus funs et inventifs de notre époque.

GIL SCOTT-HERON & JAMIE XX
We’re New Here
XL – 2011

A la demande du boss d’XL Recordings, Jamie xx offre ici une relecture du I’m New Here de Gil Scott-Heron sorti un an plus tôt. Loin d’être un simple album de remixes, l’œuvre est saisissante de modernité et voit se rencontrer deux personnages fascinants de mélancolie, l’un vivant ses derniers instants de poète urbain, l’autre ayant toute la vie à croquer devant lui. Le choc des générations.

LUMERIANS
Transmalinnia
Knitting Factory – 2011

La bande originaire de San Francisco offre avec Transmalinnia le mix parfait entre Os Mutantes, le Brian Jonestown Massacre, Amon Düül et le Pink Floyd des premières heures. Un concentré de rétro-psychédélisme brillant, teinté d’influences provenant aussi bien d’Allemagne que de New-York, d’Afrique ou encore du Brésil. C’est hypnotique, ça groove : en résumé, c’est jubilatoire.

CONNAN MOCKASIN
Forever Dolphin Love
Because – 2011

Rares sont les artistes à pouvoir prétendre au chef d’œuvre dès le premier disque. En 2011, c’est Connan Mockasin qui relève sans mal ce défi, faisant ainsi rentrer Forever Dolphin Love au panthéon des œuvres les plus inclassables et envoûtantes de notre époque. Un disque à la liberté sans limite et à la mélancolie profonde, entre pop et influences d’ailleurs, psychédélisme et jazz contemporain.

FLEET FOXES
Helplessness Blues
Sub Pop – 2011

Parfaite synthèse du folk des années 60 et 70, Helplessness Blues enfonce le clou du psychédélisme cher à Fleet Foxes, tout en tournant le dos aux influences Americana qui prédominaient sur leur premier opus. Un album qui cultive magnifiquement bien les contrastes et la personnalité atypique d’un groupe qui ne cesse de jongler entre tension et sérénité comme pour mieux émouvoir.

BEACH HOUSE
Bloom
Sub Pop – 2012

Avec des textes qui traitent de la perte de l’innocence, de l’adolescence, de l’amour impossible, et une musique pop qui sillonne la mesure parfaite entre charge mélancolique, audace romantique et production élégante, Bloom se révèle sans mal être la quintessence de l’onirisme, et aide ainsi Beach House à ériger la glauque Baltimore en nouvelle capitale de l’amour désabusé.

FORDAMAGE
Volta Desviada
Kythibong – 2012

Plutôt que de se réinventer ou d’opter pour une remise en question, Fordamage a préféré approfondir ici ce qu’il connaît et ce qu’il maîtrise le mieux : de la transe électrique mêlée à de l’énergie chaotique. En neuf titres, les nantais entretiennent ici leur différence et creusent encore plus un sillon sur lequel ils semblent avoir définitivement mis main basse. Tout un programme.

ALT-J
An Awesome Wave
Infectious – 2012

Accessible, sophistiqué, original et personnel, ce premier album d’Alt-J éblouit par la juste mesure et l’infinie délicatesse avec lesquelles ces anglais convoquent mélodies, groove, et expérimentations pour donner naissance à un registre pop et folktronica relativement avant-gardiste, et cela sans jamais tomber dans la surenchère ou égratigner la cohérence de l’album. Une vraie réussite.

ELECTRIC ELECTRIC
Discipline
Africantape – 2012

La porte d’entrée avant l’enfer, le purgatoire des dernières jubilations. Electric Electric y décline toute sa palette et prouve que, aussi complexes soient ses compositions, elles restent terriblement diaboliques. Sans jamais tomber dans la facilité, le groupe plonge dans ses propres ruptures, sillonne ses incessantes saccades et prolonge jusqu’à l’apoplexie ses autoroutes de transe.

LIARS
WIXIW
Mute – 2012

Toujours prompte à innover, Liars prend ici tout le monde à contre-courant en élaborant ce qui restera un peu comme son Kid A, son disque virage, le plus intime et introspectif. Rares sont les œuvres aussi nuancées. Sans cris et sans amplis poussés à bout, le groupe n’y perd paradoxalement aucune intensité, et évoque aussi bien Suicide que Boards of Canada, Kraftwerk que Gary Numan.

TOTAL VICTORY
National Service
Kerviniou – 2012

Coincé entre la noise et le post punk anglais des 80’s, Total Victory laisse éclater sur National Service son affection pour des compositions accidentées et contrastées. Le disque transpire la bruine de l’Angleterre ouvrière qui sait aussi parfois desserrer les dents pour laisser passer quelques belles mélodies, pas mal de subtilités, mais aussi un groove qui sait rendre la grisaille plus belle.

ANIMAL COLLECTIVE
Centipede Hz
Domino – 2012

Trois ans après le retentissant Merriweather Post Pavilion, et après être revenus à leurs divers projets solos qui les ont vu creuser chacun dans leur coin les différentes facettes du son Animal Collective, le quatuor a choisi de renouer avec la folie de ses premiers efforts en publiant Centipede Hz, une véritable profusion de folies, de couleurs, de psychédélisme et d’effets en tous genres.

TAME IMPALA
LONERISM
Modular – 2012

Révélé en 2010, Tame Impala enfonce le clou en 2012 avec ce somptueux Lonerism qui l’imposera magistralement comme la nouvelle référence pop psychédélique de la décennie. Sa tête pensante, Kevin Parker, redonne ici un incroyable coup de fraîcheur et de modernité au genre, et pose définitivement une signature artistique que bon nombre de groupes tenteront de copier. En vain.

ARCADE FIRE
REFLEKTOR
Barclay – 2013

Frappée d’une joie de vivre sans limites, la bande de Win Butler s’associe à la science rythmique de James Murphy pour mêler rock, disco et influences afro-caribéennes au travers d’un voyage musical rétro-futuriste où l’imprévisible et l’improbable avancent avec cohérence et intelligence. Une vraie leçon de maîtrise et de maturité qui fait de Reflektor un disque essentiel de la pop contemporaine.

THEE OH SEES
Floating Coffin
Castle Face – 2013

Toujours au diapason, et plus que jamais leader de cette scène californienne en termes de créativité et d’impact, Thee Oh Sees poursuit son bonhomme de chemin et s’impose. La bande de John Dwyer continue son entreprise de démantèlement du garage historique, en lui imposant des revers pop et de longues bouffées psychédéliques tout droit venus de l’Angleterre des années 60.

SON LUX
LANTERNS
Joyful Noise – 2013

Lanterns marque au fer rouge la singularité fracassante d’un Son Lux plus créatif que jamais. Le groupe n’en finit plus d’orienter sa musique vers le sensible, et livre avec ce troisième opus une œuvre belle et magistrale, composée avec intelligence, qui le rapproche plus encore de musiciens tels que Björk, Jamie Lidell ou autres Radiohead. C’est dire combien le niveau est élevé.

MARVIN 
BARRY
Africantape – 2013

Guidé par la vision d’un rock qui a fini par n’appartenir qu’à lui, Marvin est devenu grand. Avec Barry, dernier album de leur carrière, les montpelliérains renouent avec la puissance et la transe de leurs premières déflagrations, en y incorporant avec brio mélodies et relief. Le disque assène claque sur claque, sans essoufflement ni fausse note. De quoi grimper au rideau jusqu’à ronger la tringle.

NICK CAVE & THE BAD SEEDS
PUSH THE SKY AWAY
Mute – 2013

Marqué par les rides de la sagesse, c’est désormais sous un ciel apaisé que Nick Cave et ses mauvaises graines fleurissent. Nulle question de brûler des cathédrales ici, la colère n’est plus et l’heure est au recueillement sur ce Push The Sky Away qui raconte avec lucidité le temps qui passe et qui engloutit femmes et hommes de son flux sans issue. Sublime.

DEAFHEAVEN
Sunbather
Deathwish – 2013

Un des disques les plus extrêmes de ce début de siècle. A la fois furieux et mélancolique, Sunbather est l’une des branlées les plus inattendues de cette décennie. Le genre de disque qui vous déboule à la face tel un troupeau lancé à toute allure, et qui rappellerait sans mal le génie de formations comme Envy ou bien encore Rinoa. Le post-hardcore dans toute sa somptuosité.

RUN THE JEWELS
RUN THE JEWELS
Fool’s Gold – 2013

La scène hip hop a accouché en 2013 d’un monstre à deux têtes qui n’a pas manqué de faire quelques dégâts durant la décennie. Avec Run The Jewels, c’est une vraie entité que Killer Mike et El-P ont crée. Lyricists hors pairs, ils se donnent la réplique le temps de dix titres de haute volée, dans un rap vindicatif à la couleur old school, sans pour autant tomber dans la nostalgie dégoulinante.

MADENSUYU
STABAT MATER
Suyu Makinesi – 2013

Avec son sens aigu des compositions soignées, son jeu incontestable et sa force de frappe immédiate, le duo belge signe ici un troisième album magistral. Un rock sincère et instinctif, aux humeurs mouvantes, et où la puissance ne se résume pas au simple volume sonore mais plutôt à une multitude d’ingrédients, tous à la fois singuliers, contemplatifs et émotionnels. Un régal.

DARKSIDE
PSYCHIC
Matador – 2013

Nul besoin d’insister sur les consonances blues ou jazz du disque, le merveilleux réside ailleurs. Nicolas Jaar et Dave Harrington offrent ici le mariage bluffant et sans faute de l’électronique et de l’acoustique. Une œuvre chaleureuse et magistrale qui convoque aussi bien les corps que les esprits, et qui provoque, lorsqu’elle s’achève, l’irrépressible envie de recommencer le voyage.

LA FEMME
Psycho Tropical Berlin
Born Bad – 2013

Illustré par une sublime pochette signée Elzo Durt, le premier album de La Femme aura réussi à instaurer le groupe comme l’une des nouvelles révélations de la scène musicale française. Psycho Tropical Berlin lorgne du coté du krautrock, et mélange surf pop et new wave tout en faisant quelques clins d’œil aux années yéyé. Un disque malicieux et démoniaque qui en devient jubilatoire.

SUUNS
IMAGES DU FUTUR
Secretly Canadian – 2013

Moins chaotique que son prédécesseur, cet opus fleure toujours autant le souffre, bien qu’ici la violence soit intestine. On y retrouve un Suuns lancinant, suave, dans une atmosphère à la fois douce et confortable, et qui nous désoriente de son charme désuet en nous enveloppant dans une sorte de camisole psychique. Une œuvre fondatrice pour l’un des groupes les plus novateurs de la décennie.

WILLIS EARL BEAL
NOBODY KNOWS
XL – 2013

L’américain dépose subtilement ses traditionnelles compositions blues et folk dans un écrin beaucoup plus soyeux et moderne, les rendant par conséquent plus contemporaines et singulières que jamais. Un Willis Earl Beal touché par la grâce et le sublime, pour ce qui restera sans nul doute comme l’un des albums les plus habités mais aussi sous-estimés de cette décennie.

JON HOPKINS
IMMUNITY
Domino – 2013

Sur Immunity, Jon Hopkins parvient à insuffler de l’émotion dans ses productions qu’il souhaite désormais plus minimalistes et organiques. L’anglais aborde ici sa musique, aux penchants techno et électronica, comme une véritable sculpture sonore vivante, en lui offrant une production impeccable et une dimension nettement plus contemplative. L’union parfaite entre humanité et machines.

KANYE WEST
Yeezus
Def Jam – 2013

Sous cette pochette minimaliste se cache en vérité le travail le plus extrême et le moins facile de son auteur. Bénéficiant d’une position privilégiée au sein de l’industrie musicale, Kanye West délivre ici, à la surprise générale, les 40 minutes de rap les plus radicales, déroutantes et audacieuses de sa carrière, confirmant sa place essentielle sur l’échiquier du hip hop américain.

CANKUN
CULTURE OF PINK
Hands In The Dark – 2013

Captivante et atypique, cette œuvre contemplative puise ses influences dans des ambiances moites et tropicales, à la fois sauvages et urbaines, pour un rendu quasi instantané et cinématographique. Entre psychédélisme world et œuvre ambiante, Culture Of Pink est un voyage sonore et sensoriel qui réussi à prouver que complexité peut parfois rimer avec doux plaisir et extase.

BRNS
WOUNDED
Naive – 2013

Exemple d’une scène belge en constante ébullition, qui n’a cessé durant la décennie de nous surprendre, ce premier effort de BRNS a tout du petit bijou sincère et insouciant. En combinant la folie de Wu-Lyf, la science rythmique de The Rapture et la tension chère à Fugazi, les belges ont créé avec élégance un disque pop bourré d’énergie communicative, à la fois salvateur et galvanisant.

MOUNT KIMBIE
COLD SPRING FAULT LESS YOUTH
Warp – 2013

Mount Kimbie fait partie de cette jeunesse inspirée qui sait utiliser l’existant pour façonner quelque chose qui sent étrangement le neuf. Ambiances urbaines, élans jazzy, mélancolie électronique, tout se mélange ici avec finesse et sensibilité, prouvant à qui en douterait encore que ce duo est l’une des formations contemporaines les plus à même de résumer auditivement son époque.

DEERHUNTER
Monomania
4AD – 2013

Sur Monomania, les américains de Deerhunter ont eu l’excellente idée de conserver l’approche pop responsable de leur précédent coup d’éclat Halcyon Digest, mais tentent cette fois ci de la combiner avec l’esthétisme punk abrasif de leurs débuts. Le résultat est sans appel. Avec ses mélodies brumeuses et ses élans bruitistes, ce disque intrépide est le nouveau coup de maitre du groupe.

MAC DEMARCO
SALAD DAYS
Captured Tracks – 2014

Qu’importe que le canadien se répète, sa pop nonchalante fait toujours mouche. La part belle est ici consacrée à la lenteur hypnotique et à un joli vernis K7 parfait pour les vacances. Avec toutes les variations émotionnelles qui s’imposent, il y a là tout ce qu’il faut pour apprécier comme il se doit la coolitude d’un des artistes les plus marquants de cette décennie.

CLIPPING
CLPPNG
Sub Pop – 2014

Clipping confirme ici tout son potentiel à marier le gangsta rap avec une musique bruitiste. Bien que difficilement accessible sur le papier, la formule fait pourtant preuve d’une redoutable efficacité quand on veut bien la laisser dévoiler tous ses atouts. Un album aussi ambitieux qu’inconfortable, et qui rappelle combien le hip hop peut être avant gardiste quand il demeure libre.

SWANS
TO BE KIND
Mute – 2014

Véritable coup de maitre, To Be Kind est l’œuvre troublante et vertigineuse d’un Michael Gira qui marche à l’instinct au coté de son groupe. Dix pistes pour une durée dépassant les deux heures d’écoute, c’est le tarif habituel chez Swans qui, une fois de plus, maitrise et sublime comme personne ses ambiances cinématographiques à bases de répétitions et de variations d’intensité.

JULIAN CASABLANCAS & THE VOIDZ
Tyranny
Cult – 2014

Loin des contraintes et des obligations inhérentes aux Strokes, Julian Casablancas a trouvé un nouveau terrain de jeu aux cotés des Voidz. Avide d’expérimentations, l’américain laisse ici libre cours à ses idées les plus extravagantes et nourrit de nouvelles ambitions. Résultat ? Une œuvre radicale, unique et audacieuse, qu’on continuera encore de déchiffrer dans les prochaines décennies.

TIMBER TIMBRE
HOT DREAMS
Arts & Craft – 2014

Taylor Kirk a longtemps étudié le cinéma et cet album est probablement celui qui cristallise le plus son idylle avec le septième art. Hot Dreams témoigne d’une grande révérence pour les bandes son du cinéma des années 60 à 80, mais sans jamais paraître passéiste. Les chansons y évoquent autant les ruelles mal famées et les vapeurs de bouche d’égout que les grands espaces américains.

THE GROWLERS
CHINESE FOUNTAIN
Fat Cat – 2014

Ici le soleil tape le cuir ! L’air iodé prend au nez, la bonne humeur est de mise, et la décontraction flirte dangereusement avec la plus grande des paresses. Douce, chaleureuse et charmeuse, la musique des Growlers séduit illico avec des mélodies pop que le groupe n’hésite plus à emmener valser sur une plus grande variété de territoires, et que leur expérience se charge d’harmoniser.

D’ANGELO & THE VANGUARD
BLACK MESSIAH
RCA – 2014

Véritable leçon de black music et de modern R’n’B, Black Messiah signe la résurrection d’un D’Angelo qui renait de ses cendres. A la croisée entre Sly & The Family Stone et Prince, l’œuvre en impose par son intelligence, son groove sensuel et sa production futuriste. Inventif et dense, cet album se permet de réinventer le genre en douceur sans jamais le prendre de haut. La grande classe.

PLAYLIST


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