28 Mai 07 Interview : Klaxons (05-2007)
Mercredi 23 mai, les Anglais de Klaxons investissent une salle de concert parisienne pour la quatrième fois de leur carrière, et continuent de voir leur public s’agrandir à chacune de leur venue. Il est 18h, on attend patiemment de rencontrer le nouveau phénomène d’outre Manche pendant que les groupies s’entassent déjà depuis de nombreuses minutes devant la porte de La Cigale, affublées de leurs tenues flashies de rigueur pour l’occasion. Et à en voir ce défilé excentrique qui rendrait jalouses Véronique et Davina, il ne fait plus aucun doute que les Klaxons sont, qu’ils le veuillent ou non, les icônes de la jeunesse du moment. Notre heure est venue, longue montée de marches jusqu’à la loge du groupe au dernier étage du bâtiment, et le quatuor nous accueille gentiment, bien loin de l’image de déglingués imprévisibles que la presse française a pu parfois lui coller. C’est James Righton (clavier/basse/chant), le plus jeune du groupe du haut de ses 23 ans, qui se lance dans l’interview avec un enthousiasme apprécié…
« Myths Of The Near Future » est sorti il y a maintenant quelques mois, vous étiez encore au journal télévisé la semaine dernière…Comment vivez vous cette success story?
James Righton: En fait, nous ne savons pas vraiment ce qui se passe ici en France, ce que les gens disent à notre sujet. Nous bougeons tout le temps, nous allons de salle en salle, d’avion en avion… Le temps passe à une telle vitesse qu’on n’a pas le temps d’être affecté par ce que la presse dit sur nous, que ce soit positif ou négatif. Mais nous apprécions beaucoup le soutien du public français, ainsi que des médias. Ce n’est pas donné à tout le monde, tous les groupes Anglais ne bénéficient pas d’une telle médiatisation en France.
Mais ce succès ne se cantonne pas uniquement à l’Angleterre et la France… Même les Etats Unis commencent à être touchés par le phénomène Klaxons…
Le fait que notre musique se répande est, pour nous, beaucoup plus important qu’une soi-disante célébrité, que nos égos respectifs. Nous faisons de la musique pour qu’elle soit entendue par le maximum de personnes, et c’est ce qui est en train de se passer pour nous. Et c’est assez hallucinant puisque nous avons commencé avec l’idée de faire de la musique pour nous, dans notre local, puis de la sortir… Mais jamais nous n’aurions pensé en arriver là.
Quel était le mot d’ordre quand vous vous êtes attaqués à ce premier album?
Nous avions une réelle volonté de faire un album de pop assez étrange, qui réunisse nos influences à tous les trois, qui nous intéresse tous, puisque nous l’avons composé en commun. Évidemment nous voulions qu’il plaise au plus grand nombre, mais c’est le genre de chose que tu ne peux jamais vraiment prévoir. Nous étions confiants, et nous avons laissé les choses se faire…
Vous êtes devenus un véritable phénomène en Europe, et notamment au Royaume-Uni. Les gosses vont même jusqu’à s’habiller comme vous. Est-ce quelque chose que vous appréciez ou que vous trouvez dangereux? Avez-vous l’impression que le buzz que vous créez prend parfois le dessus sur vos personnalités?
Non, ça ne nous affecte pas du tout, ça ne nous domine jamais. Ce qui est plutôt bien au demeurant. Je ne pense pas non plus que ce soit dangereux, notamment parce qu’on a bien en tête que ça peut ne pas durer. Il est possible que les gens qui nous écoutent aujourd’hui, qui sont à fond derrière nous, trouvent dans quelque temps une autre égérie, se retrouvent dans un genre musical totalement différent. Nous profitons du temps présent, du fait que le public soit si passionné par notre musique. Aussi, la musique est importante, fondamentale même, mais ces personnes-là veulent aussi faire partie de quelque chose qui ait une signification pour elles. Qu’il s’agisse de musique ou non, il est toujours sain d’être passionné, et d’imiter quelque chose. Je ne suis pas non plus en train de dire qu’imiter à tout prix est bon, mais toi comme moi avons aussi adoré des groupes à une certaine époque jusqu’à faire un minimum de mimétisme, que ce soit au niveau vestimentaire ou autre. De notre côté, il faut avouer que c’est assez flatteur que tous ces gens prennent part à notre monde, à notre univers. Et c’est encore moins dangereux en ce qui nous concerne puisque nous prônons le positivisme, le fun, nous ne sommes pas des déprimés…
Selon toi, est ce que le côté festif et hédoniste de votre musique, ainsi que votre refus du réalisme, sont des raisons pour lesquelles les journalistes qualifient le registre des Klaxons comme nu rave?
C’est marrant, nu rave est un terme que nous n’approuvons pas forcément et qui tend même à disparaître peu à peu depuis que l’album est sorti. Nous ne sommes qu’un groupe de pop, et inconsciemment ou non, nous nous sommes dissociés de ce qualificatif. Mais peu importe l’étiquette, l’important est encore une fois que notre musique plaise aux gens. Nous n’accordons pas vraiment d’importance au nom qu’ils lui attribuent. Personnellement, je me sens privilégié car je ne m’intéresse pas beaucoup aux disques de pop qui sortent tous les jours, je les trouve tous ressemblants, et avec pas grand-chose à dire en général. Ils sont tous très lisses et peuvent être autant écoutés par les enfants que par les parents. Notre seule préoccupation est de ne pas tomber dans ces travers et proposer quelque chose de différent de tout ce qui peut sortir chaque jour.
C’est vrai que vos paroles sont plutôt positives. Est-ce aussi un moyen de souligner le côté festif de votre musique, ou tout simplement d’illustrer votre propre état d’esprit?
Au sein des Klaxons, c’est Jamie qui écrit la plupart des textes. En ce qui me concerne, j’essaye de ne pas écrire sur les thèmes récurrents que sont les lieux, les gens, les relations, ou d’autres retranscriptions d’une certaine réalité, notamment parce que beaucoup de groupes ne font que cela, et certains très bien il faut le reconnaître. Moi, je sature à tel point que je ressens le besoin d’autre chose, de fictions, de fantaisies… Nous nous focalisons en fait beaucoup plus sur les mélodies que sur les textes…
Il y a quelques mois, des groupes comme The Libertines ou Bloc Party, beaucoup moins « frais » que vous, connaissaient un vrai succès en Angleterre et ailleurs. Vous, vous prônez le bon temps, le fun, et cela vous réussit plutôt bien. Comment expliques-tu cela? Y a t-il un rapport avec un certain contexte social en Angleterre?
Je pense que les gens veulent tout simplement quelque chose de nouveau, et ils l’ont trouvé dans ce que nous faisons. Quelque part, c’est malheureux puisque nous en payerons nous aussi certainement les frais un jour. C’est ce que je disais tout à l’heure, plus tard, un autre groupe va arriver et va complètement changer les choses. C’est ce qui est arrivé après The Strokes, ou The Libertines, tout le monde adorait et s’habillait comme eux. Tout cela n’est qu’une affaire de cycles, et face à cela, il faut rester frais et ne pas devenir ce que tout le monde souhaite que tu deviennes. En tant que groupe, il ne faut pas se laisser enfermer dans un coin, mais opter pour une réelle évolution.
C’est un peu à cela que je voulais en venir, car votre musique est assez assimilée à une mode du moment, or les modes sont assez courtes en général. Aujourd’hui, est ce que les Klaxons se sentent capables de surprendre tout le monde avec un nouvel album?
Pour l’instant, nous n’avons que quelques idées puisque nous avons tourné beaucoup et n’avons pas forcément eu le temps de nous poser pour composer. Ce que nous ne ferons probablement pas avant la fin de l’année. Le Monde est immense et nous avons encore pas mal d’endroits à visiter. Nous essayons donc quelques trucs lors des rares répétitions ou lors des balances, mais nous ne sommes pas du genre à composer en tournée avec une guitare acoustique dans le bus. Je pense qu’une fois cette tournée achevée, nous irons un peu chacun dans notre coin pour travailler séparément et ensuite mettre toutes les idées en commun, travailler et changer les tempos. Ça prend beaucoup de temps, même si nous écrivons de nouveaux titres assez rapidement, je trouve. Je pense que le prochain sonnera certainement plus prog tout en restant pop, et je n’ai aucun doute sur le fait que nous aurons de meilleurs morceaux encore.
Il se dit beaucoup que Myspace a joué un rôle très important dans la réussite des Klaxons. Qu’en est-il exactement? Que seraient les Klaxons aujourd’hui sans ce site internet?
Je pense que c’est notre public qui nous a véritablement lancé, même si il est vrai que Myspace a rendu les choses plus faciles, a permis à d’autres personnes de nous trouver plus aisément. Avoir sa page sur Myspace est certainement aussi important que de faire un gros concert à l’heure ou je te parle. Nous avons donc fait notre page, y avons ajouté quelques morceaux et les requests se sont mises à pleuvoir sans même qu’on bouge le petit doigt. Du coup, certaines maisons de disque comme Sony se sont penchées sur nous. C’est un très bon moyen de se faire connaître, et surtout de pouvoir juger à quel point ta musique intéresse les gens. C’est aussi un point de contact puisque nous nous occupons nous-mêmes de notre page. Ce qui est de plus en plus dur, puisque nous passons des heures chaque jour à répondre aux messages, lire les commentaires, et mettre à jour les infos.
Votre musique a plusieurs fois fait l’objet de remixes. Est ce quelque chose que vous acceptez systématiquement ou êtes-vous sélectifs?
Au début, nous acceptions très facilement mais aujourd’hui nous devenons de plus en plus sélectifs, c’est vrai, et laissons aussi cela au management en quelque sorte. Nous privilégions désormais les artistes que nous aimons, ceux que nous pensons intéressants, cela arrive même parfois que nous en demandions. Certains remixes se sont d’ailleurs avérés très bons, on pensait que d’autres allaient également être convaincants de par les gens qui s’y sont attelés, et cela n’a pas toujours été les cas, donc nous les avons refusés. Les meilleurs viennent en fait de gens habitués à ce type d’exercice, je pense à Erol Alkan, Simian Mobile Disco, Soulwax. Celui de SoMe était vraiment pas mal aussi lorsqu’il a revisité « Atlantis To Interzone ». Nous avons tenté de mettre Justice sur les rangs, mais je crois qu’ils ne pouvaient pas, je ne sais plus pour quelle raison. Nous réessayerons pour le prochain single…
Daft Punk est une référence pour vous. Quel effet cela vous fait-il de partager l’affiche avec eux à Bercy le mois prochain?
Oui, c’est surtout moi qui suis fan de Daft Punk. Je suis très impatient d’être à ce concert, mais vraiment autant pour les voir que pour jouer avant eux. Je ne les ai encore jamais vus en fait, donc cela va être une soirée très spéciale pour moi. C’est en fait un rêve qui devient réalité, encore plus d’ouvrir pour eux à Paris, à Bercy. En plus, nous n’avons jamais fait de salle aussi grosse encore, ça restera certainement un grand souvenir, une belle fête. Je crois qu’il y aura Kavinsky et Sebastian aussi, mais pas Justice comme annoncé. D’ailleurs, nous les avons vus la semaine dernière à Londres, à la Fabric, c’était un truc de dingue…
Le mot de la fin…
Merci à toi, merci pour cette interview, pour ce soutien en France. C’est vraiment un plaisir pour nous de voir l’accueil que les français nous réservent à chaque fois…
No Comments