10 Avr 11 Interview – Mogwai, le discours d’un roi
Difficile de manquer l’occasion de rencontrer Mogwai quand les Écossais passent par le Nord afin d’y défendre leur superbe nouvel album « Hardcore Will Never Die But You Will« . Accessible et gentil, Stuart Braithwaite, guitariste du groupe, se colle à l’exercice de l’interview histoire de revenir sur ce dernier disque qui, plus encore après ces quelques minutes en sa compagnie, scintille de classe et d’humilité.
Pour « Hardcore Will Never Die But You Will », c’est la première fois que vous travaillez en toute autonomie via votre label Rock Action. En quoi cela a changé quelque chose?
Stuart Braithwaite: Honnêtement, ça a demandé beaucoup plus de travail, nous étions beaucoup plus impliqués dans chaque étape du processus. Cette fois, nous sommes allés un peu plus loin que la simple composition et le choix de la pochette. Il n’y a qu’en ce qui concerne la composition finalement que cela n’a rien changé, nous sommes toujours guidés par l’unique désir de satisfaction. On veut juste être contents de ce qu’on a fait lorsqu’on écoute l’album à la fin.
Certains morceaux comme « Mexican Grand Prix » sont un peu plus dancefloor que ce que l’on a pu écouter sur de précédents albums. Est-ce la direction vers laquelle se dirige Mogwai désormais?
On n’envisage pas trop les choses de cette façon à vrai dire, nous essayons avant tout de faire les choses de façon naturelle et spontanée. Disons qu’on avait envie de s’amuser avec la batterie, et que c’était l’inspiration du moment. Et si la direction de Mogwai pouvait simplement être de continuer de créer de bonnes chansons, personnellement, ça m’irait très bien.
Il y a une autre évolution dans le son de Mogwai: le clavier a beaucoup remplacé le piano sur cet album…
Barry Burns, qui est le pianiste et l’organiste du groupe (il a rejoint le groupe à partir de « Come On Die Young »), est très présent dans la composition des morceaux. Du coup, la tonalité dépend vraiment de ses inspirations du moment. En fait, ça illustre assez bien le coté spontané que j’ai évoqué précédemment. Il se trouve que Barry a acheté pas mal de synthés récemment, et qu’il s’amuse beaucoup avec. Je crois que c’est la raison pour laquelle le clavier est très présent sur cet album tout simplement.
Comment choisissez vous les titres de chansons? Visiblement, ca n’a pas grand chose à voir avec la musique? (« You’re Lionel Richie », « How to Be a Werewolf »…)
Oui, c’est vrai, ça n’a aucun lien. En général, c’est quelque chose qui a attiré notre attention ou qui nous a fait rire, un truc un peu pris au hasard dont nous aimons la tonalité. Mais je confirme, ça n’a pas grand chose à voir avec la musique. Le titre du dernier album, par exemple, est tiré d’une scène a laquelle assisté un de nos voisins. C’était lors d’une dispute entre un type et un responsable de magasin, pour une histoire de vin je crois bien. Le responsable ne voulait pas céder à sa demande, et c’est là que le type lui a sorti: « Hardcore Will Never Die, But You Will!« . On a trouvé ça excellent, on s’est dit que ça ferait un bon titre d’album.
Peux-tu nous en dire un peu plus sur le deuxième CD qui contient ce fameux morceau de 26 minutes « The Singing Mountain »?
C’est un morceau qu’on a composé l’année dernière pour Douglas Gordon. Douglas est un artiste pour lequel on a déjà écrit « Zidane » en 2006. Il travaillait sur un nouveau projet, et nous a demandé si on pouvait composer quelque chose pour lui. Son projet était présenté dans le cadre du festival d’art à Emscher Island, en Allemagne. Nous n’avons malheureusement pas eu l’opportunité d’aller le voir puisqu’on bossait activement sur notre album. Mais oui, je trouve également que c’est un bon morceau. Il est vraiment diffèrent de ce qu’on peut entendre sur l’album, et je suis content que les gens aient l’opportunité de l’écouter. Et puis, ce CD à le mérite de prouver qu’on peut être aussi assommants dans le rythmé que dans le contemplatif (rires).
Aimeriez-vous à nouveau composer la musique d’un film, comme vous avez pu le faire avec « Zidane »?
Oui, on aimerait bien. Un film d’horreur par exemple, moi j’adorerais. Mais on est ouvert à tout. Enfin bon, je ne suis pas certain que notre musique puisse vraiment coller sur une comédie non plus. (rires)
Vous n’êtes pas très adeptes des featurings, ou des invités plus généralement, qu’ils soient musicaux ou vocaux. Y a t-il des raisons à cela?
Sur le nouvel album, il y en a, mais c’est vrai qu’on le fait assez rarement. La difficulté majeure des featuring c’est que, par la suite, il est assez délicat de jouer le morceau live et c’est d’autant plus vrai quand l’intervention est singulière. On a rencontré ce problème avec des titres de l’album « Rock Action » par exemple, celui dans lequel Gruff Rhys de Super Furry Animal a participé. Donc nous limitons un peu les participations extérieures c’est vrai. Mais c’est surtout pour être en mesure de pouvoir les jouer par la suite.
En France, Mogwai est souvent étiqueté comme le roi du « post rock ». Que penses-tu de ce statut?
Je ne suis pas très fan de cette expression, mais je comprends bien l’idée. Quand on a débuté, il y avait des groupes instrumentaux ou quasi instrumentaux comme Tortoise ou Godspeed You! Black Emperor qui cartonnaient, et ce terme a permis de les regrouper dans un courant musical. Personnellement, je ne l’utilise pas, je pense que nous sommes avant tout un groupe de rock’n roll et que notre musique n’est pas si éloignée de Joy Division ou Sonic Youth. Je ne prétends pas être à la hauteur de ces groupes en disant cela, je parle juste de ceux que j’affectionne, ceux qui ont eu une réelle influence sur nous.
Ecoutes-tu plutôt du contemporain ou es-tu amateur de courants musicaux plus anciens?
Les deux, vraiment. J’écoute pas mal de vieux trucs c’est vrai, mais qui sont des découvertes pour moi. J’adore découvrir de vieux morceaux de blues par exemple. Mais, honnêtement, je peux autant m’exalter sur un morceau de hip hop, que sur de l’electro ou un groupe de guitares. Pourvu que ce soit de la bonne musique.
Ton disque du moment?
J’écoute beaucoup Belong, un groupe américain qui a sorti un premier album intitulé « October Language » il y a quatre ou cinq ans et que j’ai écouté en boucle pendant un bon moment. Ils viennent de sortir « Common Era ». C’est très diffèrent mais tout aussi bien, avec pas mal de bons jeux de batterie dedans.
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