Interview : Homeboys (11-2003)

Interview : Homeboys (11-2003)

L’enrichissement de votre son est en partie dû à la contribution d’un nouveau guitariste. Pouvez vous nous le présenter? Quel est son rôle dans la musique des Homeboys aujourd’hui? Pourquoi avoir voulu élargir le line up?

Sylvain: Le line up n’a pas été élargi, il y a eu un remplacement de guitariste. Niko, qui était avec nous depuis le début, a souhaité arrêter de jouer dans HomeBoys. Le groupe nous prenait de plus en plus de temps et il ne voulait pas forcément aller dans la même direction que nous. Je crois aussi qu’il était un peu fatigué par le côté “rock’n roll” du truc. Tout ce qui est concerts loin de chez nous, la route, les tournées à l’arrache… Et de notre côté, nous avions dans l’idée de jouer et répéter de plus en plus, alors il a préféré arrêter plutôt que de nous freiner. C’est Chris qui le remplace depuis maintenant plus d’un an et demi. Avant, il jouait de la basse dans Informers, un groupe punk de Paris. Il nous a apporté un petit côté pop dans notre manière d’aborder le punk rock, il est fan des Foo Fighters… Son truc, c’est les arrangements de guitare. Je crois que notre musique a gagné en richesse et peut être aussi en finesse sans pour autant perdre en énergie.

Cette remarque ne va peut être pas vous plaire, mais j’ai le sentiment que les moyens plus importants accordés à “Breaking Away” le fondent dans le moule du punk mélodique français. Je trouvais que “Disconnected People” avait un son plus original même si les compos étaient moins chiadées… Comment jugez vous cet album avec le recul? Êtes vous un peu d’accord avec moi ou pas du tout?

Sylvain: Je suis assez d’accord avec toi, c’est vrai que “Disconnected People” avait un son bien particulier, un son “HomeBoys” qui nous caractérisait depuis nos précédentes démos et 45 tours. Nous sommes très fier de cet album, il caractérise bien ce que doit être, pour nous, le premier album d’un groupe de punk rock. Composé dans l’urgence, également enregistré dans l’urgence et à l’arrache avec tout ce que cela implique comme défauts techniques, mais ça fait partie du disque et on trouve qu’il sonne super bien comme ça. Nous avons voulu aborder le deuxième album d’une manière complètement différente. On trouvait qu’il n’y avait aucun intérêt à refaire la même chose. L’idée pour “Breaking Away” était d’aller plus loin que dans “Disconnected People”. Plus de morceaux, plus variés, plus de temps pour les enregistrer, plus produits. Nous étions tous malades quand nous avions enregistré les voix de “Disconnected People”, alors là, nous avons pris notre temps et on s’est lâché, notamment sur les choeurs. On ne sait jamais combien de temps un groupe indé va durer. Regarde l’exemple de Second Rate… On trouve que ce serait dommage de nous freiner sur un disque alors que l’on ne sait jamais ce que le futur nous réserve. Nous voulions donner le maximum sur cet album. Mais, par contre, je ne trouve pas qu’avec ce nouvel album nous nous fondions dans un moule punk mélodique français, au contraire. Je pense que nous sommes allés dans des directions qui ne sont pas si souvent empreintées par les groupes français. Je pense surtout au côté “chanson” de nos morceaux et à l’esquive de toute démonstration technique. Nous en serions de toutes façons bien incapables. En France, si tu essais de faire un truc classe, il y aura toujours des gens pour te le reprocher, comme si ça ne se faisait pas et que les groupes français étaient condamnés à devoir rester cheap. Par contre, si tu viens d’outre Atlantique, y’a pas de problème, on ne te prend pas la tête avec ça. Maintenant, on ne sait pas ce que nous allons faire sur le prochain disque: du punk old school super énervé avec un son crade, ou de la pop punkisante, qui a l’air d’être la tendance du moment pour passer sur Europe 2…

On pense un peu aux Burning Heads à l’écoute de votre punk. Dites nous en quoi les orléanais sont pour vous une référence…

Sylvain: C’est surtout eux qui nous ont donné envie de faire un groupe. Je les ai vus en 94 et ça a été le déclic. Alors on s’est dit: “on va faire un groupe qui joue à donf et qui envoie sa race comme eux !!”. Nous avons formé HomeBoys comme on pouvait, je n’avais jamais joué de basse, Cyril n’avait jamais chanté mais nous voulions faire un groupe. Aujourd’hui, les Burning le disent encore sur scène avant de jouer Autopilot Off je crois : “y’a pas de règles pour jouer du punk rock, allez y !!” Et c’est ce que nous faisons encore maintenant, faire ce que nous aimons et kiffer. Et puis plus sérieusement, pour nous les Burning sont un modèle d’intégrité et la preuve que l’on peut faire du punk rock avec un discours intelligent et une démarche sans compromis foireux. De toutes façons, pour moi, les Burning sont de loin le meilleur groupe de punk rock. Je pensais qu’avec notre dernier disque, la comparaison avec eux allait s’atténuer un peu mais apparemment cela continue. Je n’en ai jamais parlé avec eux, mais je me demande ce que ça leur fait qu’il existe un groupe pour qui ils représentent autant une référence. Peut être que c’est super relou, je sais pas.

Vous faites partie à part entière de la Emo Glam Connection. Même si vous n’en n’êtes pas les initiateurs, pouvez nous donner son but et nous faire un bilan sur ses répercussions tant sur vous que sur le public?

Sylvain: La Emo Glam Connection est le nom que les Dead Pop Club et les Second Rate on mis sur une bande de sales gosses qui ont des groupes un peu partout en France et qui, à force de se croiser sur différentes scènes, se sont trouvés des affinités. Il se trouve que nous nous sommes souvent retrouvés à jouer ensemble, et qu’à chaque fois ça a fini en grand concours de n’importe quoi. L’idée pour les disques Emo Glam Connection est de présenter une vision du rock français différente de celle toujours matraquée par les gros médias. Il existe une scène bouillonnante qui se bouge et fait bouger le public dans tout l’hexagone sans pour autant avoir des grosses maisons de disques derrière elle. Et bien sur, je ne parle pas que des groupes estampillés “Emo Glam”. Ce qui est intéressant avec ce type de rapprochement, c’est que nous arrivons à faire se mélanger différents publics. Nous ne faisons pas forcément la même musique que Dead Pop Club par exemple mais quand nous jouons ensemble ça le fait. Je crois aussi qu’une partie des kids en a assez des groupes qui se la jouent à fond, se prennent pour des stars, et qui finalement manquent singulièrement d’âme. Des gens viennent nous voir après les concerts et nous disent qu’ils trouvent ça cool de voir des groupes qui s’amusent en concert, donnent tout mais qui ne se prennent pas forcément au sérieux.

Quelles sont les ambitions des Homeboys dorénavant?

Sylvain: Nous aimerions pouvoir tourner toujours plus. Je crois que nous n’en demandons pas plus. Nous avons formé un groupe pour faire des concerts et nous éclater. C’est toujours notre priorité aujourd’hui, on trouve ça super cool de jouer devant de plus en plus de monde et que se soit de plus en plus la fête. Le truc qui me fait plaisir est quand je vois un mino avec un tee shirt Blink182 slamer sur HomeBoys et s’amuser comme un malade. Je me dis que ce serait cool si plus de kids écoutaient aussi des groupes indépendants et pas seulement les grosses machines matraquées par les radios. En fait, il faudrait que HomeBoys cartonne grave sur Crash Disques, histoire de foutre la haine aux majors qui sont désespérément à la recherche du Sum 41 français…

Que vous manque t-il pour estimer atteindre l’apogée de votre carrière?

Sylvain: Il faudrait peut-être que l’un d’entre nous meure étouffé dans son vomi… Non, tu sais, je ne pense pas que l’on puisse parler de carrière pour un groupe comme nous. Nous faisons de la musique pour nous amuser, pour faire ce qui nous plaît. C’est incroyable de faire des disques, que des gens viennent te voir jouer à des centaines de kilomètres de là ou tu habites. On prend du bon temps en faisant les choses du mieux que nous pouvons. Nous sommes juste en train d’accumuler des milliers de souvenirs pour quand nous serons vieux.

La scène française, à intervalles réguliers, perd une partie de ses représentants (Seven Hate, Second Rate…). Quelles sont les difficultés que vous rencontrez principalement?

Cyril: Les difficultés sont assez nombreuses en fait. Ça commence par les concerts à trouver vu les problèmes croissants des lieux qui programment des groupes (salles, bars, festivals…). Les lois sont de plus en plus contraignantes et les organisateurs ont de plus en plus de mal à arriver à monter des évènements. Plus largement se pose la question de la musique amateur en France. Elle devient de plus en plus impossible. Je parle pour notre cas précis. Pour la production de l’album, on a voulu faire les choses dans les règles de l’art. Les règles sont telles que l’on nous demande de l’argent avant même d’avoir gagné un rond sur notre album. Il y a aussi toutes les questions d’assurances quand on va jouer, de rentabilité des concerts. Je ne vais pas rentrer dans les détails mais aller jouer quelque part coûte (camion, essence, péages, accessoires, baguettes, cordes, lampes etc…), et vu les cachets que l’on pratique, il est impossible de salarier les gens. Ce n’est pas par volonté de truander, mais c’est tout simplement parce que c’est impossible. Si on le faisait, on serait à la rue sur 99 % des dates. Mais ça, les pouvoirs publics ne s’en préoccupent pas et, même pire, ferment les yeux sur ces pratiques. C’est un peu tout le monde le sait mais personne ne dit rien. Etre hors la loi c’est pourtant, je ne pense pas, une fatalité mais il faut une volonté politique claire pour pouvoir y arriver. Ca n’a pas l’air d’être à l’ordre du jour de ces messieurs.

Quelles solutions, d’après vous, résoudraient ces problèmes?

Sylvain: Les solutions vont peut-être se trouver d’elles mêmes du fait de ce qui est en train de se passer politiquement et socialement. Nous revenons de plus en plus dans le passé. Je ne sais plus si nous sommes sous Raffarin, Giscard ou Pompidou. Les grands magasins de disques ne veulent plus vendre que de la “Star Pop Academy” au détriment de la place accordée aux petits groupes. Les bars se font emmerder et les salles n’ont plus les moyens de faire autant de concerts qu’avant à cause de la baisse des subventions. Les intermittents se font guillotiner. Tu vas sûrement trouver ça paradoxal, mais tout ce contexte va peut-être faire en sorte que le rock se réveille en France. Les groupes seront de plus en plus énervés et les gamins aussi. Des réseaux parallèles devront réapparaître pour que les artistes undergrounds puissent se produire. Des disquaires indépendants rouvriront, tout simplement parce que tu ne pourras plus trouver certains disques ailleurs que chez eux… Je rêve un peu, beaucoup même. Mais il nous faudrait un nouveau Béruriers Noirs qui remplisse le Zénith pour 8 euros la place. C’est sur que ce n’est pas avec les groupes de néo métal insipides que les renseignement généraux vont flipper. Quand les gens en auront marre de se faire endormir le cerveau, il y aura forcement une réaction. “Formez des groupes de rock libres !!”.

D’où en sont les Homeboys avec l’étranger? Comptez vous vous y rendre?

Sylvain: Pour l’instant, nous n’avons pas attaqué le reste de la planète mais c’est vrai que nous y pensons de plus en plus. Des potes d’autres groupes qui jouent régulièrement à l’étranger nous disent qu’il y a pas mal d’autres pays en Europe qui sont bien plus “rock’n roll” que la France. Nous avons en projet de faire une mini tournée en Europe avec un autre groupe français, mais rien n’est sur alors je ne vais pas m’étendre sur la question…

Avez vous des projets sur le feu?

Sylvain: À part les concerts pour défendre notre nouveau bébé, nous avons enregistré une reprise des Ludwig, “New Orleans”, pour un tribute qui devrait sortir début 2004. Sinon, je vais m’occuper de notre site internet avec notre webmaster parce que, jusqu’à présent, on a un peu pris ça à la légère, alors que je m’aperçois que c’est un bon media qui peu apporter un vrai plus à un groupe comme nous.

Le mot de la fin…

Sylvain: Merci à toi de nous donner une nouvelle fois la parole. Ça fait plaisir, surtout que je sais que tu nous suis depuis le début. Salut à tout tes lecteurs et à bientôt sur la route.


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