Interview : High Tone (05-2005)

Interview : High Tone (05-2005)

Comment avez-vous abordé l’enregistrement de “Wave Digger”. Souhaitiez-vous donner un sens particulier à cet album?

Pour ce troisième opus, nous voulions essayer de creuser de nouveaux terrains sonores, et ce part le biais du hip hop “electro” et de la jungle bien méchante, tout en gardant une base dub comme à notre habitude. Il n’y a pas vraiment un sens à ça, c’est juste une envie de faire autre chose, éviter de se répéter et de se reposer sur nos lauriers comme on dit. De ce fait, l’album peut surprendre les habitués d’High Tone aussi bien en positif qu’en négatif, mais il reste encore des morceaux plus proches des précédents albums et quelques trucs assez expérimentaux.

Comment abordez-vous le travail de composition?

La compo se fait à l’ancienne, 5 musiciens réunis dans un local de répétition avec un mini disk qui tourne en permanence afin de capter les bon moments musicaux de la journée. Ensuite, vient le travail de réécoute et de sélection de passages qui semblent intéressants, puis la création finale du morceau en répète ou sur un ordi, seul ou a plusieurs selon les cas. Il arrive que certains titres se finalisent à l’enregistrement, même lorsqu’on est en studio. Et le mix final peut lui aussi faire changer des idées et donner d’autres directions à un son au dernier moment.

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Sur “Wave Digger”, le morceau “Headline” présente un son très électronique. Le titre “Larsen” évolue, lui, dans les sphères du hip hop, tandis que “Spacedunk” (feat. 2TT – ex clavier de Kaly) flirte avec des sons funky… D’où vient cette capacité à marier les sons, les ambiances? Est-ce la marque de fabrique de High Tone?

Depuis le début, High Tone a toujours mélangé des sources sonores diverses et variées, c’est peut être effectivement notre marque de fabrique, mais c’est également celle de pleins d’autres artistes (Dj Shadow , Amon Tobin, Dj Food…etc). Après, chacun fait son propre mélange et cela est du aux influences de chacun.Votre musique draine aussi bien des amateurs de dub, de musiques électroniques, de techno, de rock, de rap…

Certains n’hésitent d’ailleurs pas affirmer que High Tone réconcilie les courants musicaux… Quelle est votre réaction à ces dires?

Cela prouve que les gens sont ouverts d’esprit, et tant mieux si ça réconcilie les courants musicaux. En tout cas, ce n’est pas notre but premier, on fait de la musique pour ce faire plaisir avant tout.Vous êtes les premiers de la scène dub française à clairement vous orienter vers l’electro hip hop.

Est-ce par souci d’originalité? Etes vous sensibles à cette scène?

On en écoute effectivement beaucoup, ce n’est donc pas pour faire original mais vraiment par envie. Le hip hop est une musique qui, comme nous, se sert de pas mal d’influences et ce depuis le début, en samplant dans la soul, le funk, la musique des Kraftwerk, le jazz, le reggae. C’est un style qui a encore de beaux jours devant lui à mon avis, d’autant que maintenant il se fond avec la scène électronique c’est ce qui lui permet d’évoluer constamment; le hip hop s’alimente de tout ce qui se fait musicalement, il peut tout digérer comme le dub.

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La scène dub française est devenue très (trop?) riche. Comment gère t-on sa différence au milieu de tant de groupes? Qu’est ce qui fait la différence selon vous?

C’est vrai qu’il y a pas mal de formations qui se sont montées depuis nos débuts. Avec les Improvisators Dub, Kaly, Zenzile, Brain Damage, nous avons commencé à peu près au même moment et chacun dans un style bien particulier. Mais je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à explorer dans ce style musical pour les formations à venir. Apres, il arrive que certains groupes soient influencés directement par nous, mais ce n’est pas négatif pour autant, les horizons sont loin d’êtres saturés je pense.

Avec l’expérience désormais, quel regard portez vous sur cette scène electro dub française?

Je pense qu’elle amène du renouveau dans le paysage musical, elle a sortie le dub, “musique propre de studio”, pour le faire vivre sur scène de façon plus rock’n roll. Ainsi, il a pu se déverser dans des oreilles de plus en plus nombreuses.

De jeunes groupes français vous ont-ils séduits?

Récemment, j’ai vu les Scotchy Dub (from Brest), c’était bien pêchu. Les Manipulators, très bien également mais je ne sais pas d’ou ils viennent.Et à l’étranger, quel est votre dernier coup de coeur?Les productions sur le label allemand Chain Reaction sont mortelles (très minimales et dark à souhait), Rythm & Sound, Martin Campbell (Channel one UK) avec qui nous allons faire un maxi 4 titres, ainsi qu’avec Shanti D qui a chanté sur l’album de Junior Cony.

Une fois encore, le visuel de “Wave Digger” est particulièrement réussi. On sent que vous attachez une importance particulière à l’artwork de vos albums. Qu’est ce que cela représente pour vous?

C’est important pour nous d’avoir dans les mains un objet que l’on apprécie, c’est ce qui fait la différence avec le simple CD gravé. De plus, le format digipack est plus chaleureux que le boîtier cristal de base, tous les disques sur le label Jarring Effects sont de ce format là et je trouve ça classe…. Après, le graphisme est dans une sorte de continuité car nous travaillons avec la même personne depuis le début, même si cette fois, il a été aidé par un ami à nous qui a fait la bestiole bizarre en 3d.

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Quelle est la play-list de High Tone en ce moment?

Je ne peux pas répondre à la place de mes camarades alors je t’en donne une à moi par exemple: Airborn Audio, The Perceptionists, Les Ethiopiques (jazz ethiopien réédité), Zenzile, Clouddead, Boards Of Canada, The Grimme, Autechre, Fingathing, The Bug et kid 606.

En 2004, High Tone a sorti “Highvisators”, un disque conçu avec Improvisators Dub. Renouvellerez-vous ce genre d’expérience dans les années à venir?

Il y a déjà eu le “Kaltone” avec Kaly Live Dub, nous avons en prévision le “Zentone” avec Zenzile, le “Wang Tone” avec le musicien chinois Wang Lee, et les maxis roots avec Martin Campbell et Shanti D. Bref, y’a encore pas mal de projets à venir. 2005 sera une année assez productive discographiquement pour nous et c’est tant mieux car nous aimons beaucoup faire du studio. J’en profite pour faire la pub du studio de Jarring Effects à Lyon, géré par Celine “Lenfant”, duquel beaucoup de choses sont sorties ces 3 dernières années.

En compagnie de Amélie les Crayons, Agaria, Cie De Akto, Gnawa Diffusion, The Hacker, Kent, Loïc Lantoine, Cie Käfig, Sept en Si, le Son Du Peuple, Têtes Raides, vous avez participé, le 21 mars dernier au Transbordeur de Lyon, à une soirée de solidarité consacrée à Fred Nérac, Florence Aubenas, Hussein Hanoun Al-Saadi, et Guy-André Kieffer, journaliste franco-canadien disparu en Côte d’Ivoire le 16 avril 2004. Comment s’est concrétisée cette soirée? Qui en est l’initiateur? Quelle importance y accordez-vous?

Cette soirée a été à l’initiative de Reporters Sans Frontières. Nous n’avons malheureusement pas pu tous y participer car High Tone n’était pas prêt pour un concert à ce moment là, donc j’y suis allé seul sur scène avec les platines pour représenter le groupe. Nous essayons au maximum de nous déplacer pour ce genre d’action, cela nous semble important, les groupes qui sont présents sont là pour soutenir une cause qui les touche de près ou de loin. Ainsi, ils ramènent leur public. Cette soirée a très bien marché, les Lyonnais étaient présents ce soir là pour marquer le coup, en espérant que les choses bougent par la suite grâce à ce genre de manifestation. Même si cela semble n’être qu’une goutte dans l’océan, je pense que c’est important pour les gens proches des victimes.

Et High Tone en concert? Quelles sont les évolutions visuelles?

Nous avons voulu changer le dispositif visuel cette année et ceci avec l’aide de trois écrans en fond de scène au lieu d’un, et de formes différentes. Le résultat nous a vraiment convaincu, Xavier à la lumière et Nico à la vidéo ont travaillé le set sur papier puis concrètement sur la scène. Pratiquement toutes les images sont réalisées par Nico, il ne fait presque plus de samples video. De plus, on se sert du son qu’il envoie à certains moments du set. Lorsque l’on joue le morceau avec The Real Fake MC, c’est Nico qui balance le clip vidéo qu’il a réalisé, et il déclenche les paroles sur notre musique. On peut dire que c’est plus interactif qu’avant et aussi plus complexe.

Le mot de la fin…

On continuera a faire du son encore un bout de temps je pense. Sans compter sur les projets solo des musiciens: Twelve sort son album “Perfectly Safe” le 23 mai 2005, Aku-fen (guitariste) travaille sur une compile electrohiphop à sortir sur Jarring Effects. Essayer de ne pas tourner en rond quoi……


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