30 Mar 11 Bibio – “Mind Bokeh”
Album
(Warp)
04/04/2011
“Ambivalence Avenue“, premier opus de Bibio chez Warp sorti en 2009, restera à jamais gravé dans nos mémoires, tant il avait provoqué chez nous, non pas un simple coup de cœur, mais un véritable coup de foudre dès la première écoute. Autant dire donc que nous avons abordé l’arrivée de son nouvel album, “Mind Bokeh”, avec un mélange d’hystérie euphorique et d’appréhension, de crainte qu’il ne soit pas à la hauteur de son prédécesseur… Les attentes placées sur ce disque étaient très fortes, c’est le moins qu’on puisse dire.
Mais heureusement, Bibio n’a absolument rien perdu de sa capacité à provoquer chez son auditeur des émotions intenses, à faire vriller ses tympans et à l’initier à des sonorités rares, toujours étonnamment inspirées. “Mind Bokeh” se présente ainsi comme une galette très différente d’”Ambivalence Avenue”, même si la patte de l’anglais d’adoption est immédiatement reconnaissable. L’album s’ouvre en effet avec “Excuses” sur un bruit céleste de fine pluie et de feuilles humides invitant au recueillement, avant d’évoluer vers des sons électroniques violents et saturés, rappelant l’électro de Clark ou d’Autechre. Ce titre est celui qui se rapproche peut-être le plus des productions de son précédent album, avec la berceuse cotonneuse “Mind Bokeh” et le doux et élégant instrumental “Saint Christopher”.
Le reste de l’opus révèle quant à lui de très belles surprises, Bibio abandonnant le folk mélancolique et bucolique pour lorgner davantage vers une pop vintage avec sa voix limpide pour fil conducteur. Les influences 70’s dont raffole le producteur sont ainsi à l’honneur dans “Pretentious” qui séduit par son downtempo groovy, “Anything New” teinté de hip-hop à la Madlib, et le terriblement funky “Light Sleep”. Mais Bibio va également plus loin en faisant cohabiter à plusieurs reprises des éléments antithétiques, comme des sonorités acoustiques aériennes, voire nostalgiques, et une electronica puissamment torturée sur laquelle s’achèvent plusieurs morceaux (“Excuses”, “Artists’ Valley”, “More Excuses”). Il s’offre même la liberté de proposer un titre à la jovialité régressive et barrée intégrant des éléments de P-funk (“K Is For Kelson”), et un hit indie pop-rock ultra efficace, à faire pâlir d’envie Phoenix (“Take Off Your Shirt”, un de nos coups de cœur malgré sa moindre originalité).
Bibio s’éloigne donc de la nature avec ce nouvel album pour nous faire voguer vers des sonorités plus industrielles, sombres et psychées, qui conservent malgré tout un fort pouvoir onirique. C’est bien là tout le talent de cet artiste qui continue à produire une musique pulsionnelle, spontanée et libre de tout cadre (les longueurs extrêmement variables des tracks en sont d’ailleurs l’illustration la plus concrète), qui apaise tout autant qu’elle bouscule. Avec “Mind Bokeh”, qui marquera sans aucun doute l’année 2011, Bibio parvient donc à enfoncer le clou d'”Ambivalence Avenue” pour prouver qu’il est bel et bien l’un des nouveaux grands noms de l’électro indé mondiale. Ou tout simplement un pur génie du son.
En écoute
Pas de commentaire