The Black Keys – ‘Turn Blue’

The Black Keys – ‘Turn Blue’

Album / Nonesuch / 12.05.2014
Blues pop

Voilà maintenant six ans que Carney et Auerbach ne lâchent plus Dangermouse, ce producteur star qui a su faire passer le duo de l’ombre à la lumière en plongeant ses influences blues incandescentes dans un bain d’arrangements pop, affûtant ses mélodies, son groove, et lissant un peu son rock au passage. Jusque là, soit le temps de trois albums, la formule avait plutôt fait ses preuves, trouvant dans la variété des plaisirs le moyen de fuir la routine. ‘Turn Blue’, en revanche, pourrait bien être la collaboration de trop, un huitième testament de Black Keys devenus prévisibles, à tel point que jamais nous n’avions ressenti si peu de manque à leur égard pendant que les deux n’avaient jamais mis autant de temps à sortir un nouvel opus: un triste constat qui en dit long sur le manque de prise de risque, et la grande facilité qui transpire tout au long de ces onze titres, trop imprégnés de la patte si identifiable de leur fidèle collaborateur, comme ‘Waiting On Words’ ou ‘In Our Prime’ finissent d’ailleurs de le souligner.

En effet, ce qui était jusque là considéré comme une cerise sur le gâteau des Black Keys finit par tristement l’alourdir, faire planer le doute sur leur force identitaire, sur la profondeur de leur inspiration, mais aussi sur leurs réelles intentions maintenant qu’ils semblent s’être habitués au confort de la popularité (’10 Lovers’, le fatiguant ‘Fever’), à l’accueil chaleureux des publicitaires ou cinéphiles. Votre serviteur ne se revendiquant pas des premières heures, n’y voyez pas un discours nostalgico-intégriste, seulement la déception de voir deux imparables talents peinant désormais à surprendre et s’élever, servant tout au long de ce ‘Turn Blue’ – qu’on semble déjà connaitre avant même de l’avoir écouté – tout ce que le grand public attend finalement d’eux: des refrains du dimanche matin à tapoter sur le plan de travail de la cuisine en attendant que les toasts grillent (‘In Time’), comme des ballades électriques certes jolies et sympathiques qui, au mieux séduisent (‘Weight Of Love’, ‘Turn Blue’), au pire sont promises à des écoutes éphémères (‘Year In Review’, ‘Bullet In The Brain’). Au milieu de tant de courbettes, les contours rock n’roll de ‘It’s Up To You Now’ comme du stonien ‘Gotta Get Away’ prendraient presque des airs de rébellion. C’est pour dire à quel point il reste peu de chances à ce ‘Turn Blue’ d’être dérangé une fois qu’il aura rejoint ses ainés nettement plus sollicités. Du changement, vite!

‘Weight Of Love’, ‘Turn Blue’, ‘Gotta Get Away’


1 Commentaire
  • Limma Recha
    Posté à 10:40h, 15 mai Répondre

    Tout à fait d’accord avec cette critique. Dangermouse a prouvé mainte fois qu’il était très très talentueux (Grey album, Gorillaz n°2, Rome……) mais cette année c’est pas ça. On sent la fatigue (?) en tout cas le manque de créativité oui c’est sur. Et comment cela se traduit-il ? Par une standardisation et une banalisation du son Dangermouse, à tel point que si ça continue comme ça on ne pourra plus distinguer un morceau des Black keys et un morceau de Broken Bells….j’exagère un peu mais….
    Dangermouse moi je crois encore en lui, mais parfois il faut faire des pauses, chercher autre chose….

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