Sleaford Mods – ‘Austerity Dogs’

Sleaford Mods – ‘Austerity Dogs’

Album / Deadly Beef Burger / 22.08.2013
Poésie punk hop

Sleaford Mods ne s’embarrasse pas des orchestrations complexes et des arrangements surfaits. Avec pour seuls instruments une basse brute et répétitive injectée dans une programmation rythmique aussi binaire qu’entrainante, le binôme de Nottingham préfère envoyer à la charge la voix singulière et colérique de son porte-parole charismatique Jason Williamson. Autant performer que provocateur, droit comme un ‘i’ derrière son micro, et tel un orateur hypnotisant la foule, il scande aussi fort qu’il distribue uppercuts et directs au foie avec une assurance inébranlable, un langage brutal, et l’insolence d’un rude boy anglais que rien ni personne ne pourra mettre au tapis.

Et c’est avec son nouvel album ‘Austerity Dogs’ – véritable manifeste du poing levé et à la pochette explicite – que le duo annonce la couleur et balance sans retenue douze titres originaux, où tirades contestataires et ambiances insalubres viennent nous percuter de plein fouet. Les morceaux s’enchainent à une vitesse éclair et vont à l’essentiel, sans fioriture ni complaisance. Chaque sillon est un jet de postillons porté à la face du monde. De son regard aussi déterminé que glaçant, le bonhomme n’hésite pas à égratigner et à renvoyer tous ses contemporains dans les cordes. Politique, société, groupes de tous poils, tout le monde en prend pour son grade, sans ménagement ni formule de politesse (‘Fizzy’, ‘Donkey’).

C’est dire le caractère trempé du mec, préférant par expérience la libre expression à celle crachée par les amplis des précédentes formations dans lesquelles il officiait et s’ennuyait fermement. Pourtant, malgré le côté frontal des morceaux et de certaines orchestrations aussi épurées que magistrales dans leur minimalisme (‘My Jampandy’, ‘Don’t Wanna Disco or 2’, ‘Showboat’), le groupe prouve qu’on peut faire bouger les têtes avec peu, et une bonne dose d’ingéniosité. A l’instar d’un Andy Falkous (McLusky, Future Of The Left), Williamson n’oublie jamais de nous accrocher de sa voix rauque et réunit l’auditoire de ses lignes vocales tapageuses à effet immédiat. Testez ‘PPO Kissing Behinds’, ‘Wage Don’t Fit’, ou le très bon ‘Five Pound Sixty’ au refrain admirable, démontrant aisément que le performer détient aussi une force mélodique aussi efficace que maitrisée.

On respire dans le bagage de Sleaford Mods un panel de connaissances musicales héritées de toute la largeur du rock, mais surtout un rappel nécessaire aux origines du punk anglais, incisif et engagé qui, subtilement détourné dans des rythmiques synthétiques et soutenu par une voix insolite, devient un monde à lui tout seul, faisant du groupe une entité distinctive et hybride. Que la vieille France se prépare: les anglais débarquent et risquent avec cet album de provoquer des insurrections à grands coups de gueule dans les micros.

‘Donkey’, ‘PPO Kissing Behind’, ‘Five Pound Sixty’


1 Commentaire
  • Christophe
    Posté à 17:41h, 04 novembre Répondre

    Tout à fait Thierry.
    Ils étaient à Paris (à Montreuil, aux Instants chavirés) il y a trois jours: 35 minutes de set très intenses! Ne ratez pas leur prochain passage ici ou là.

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