Roi Heenok – “Cocaïno Rap Musique”

Roi Heenok – “Cocaïno Rap Musique”

Cocaïno Rap Musique[Album]
09/06/2008
(Gangster & Gentleman/Nocturne)

Roi Heenok le reconnaît lui-même: “avec ma came, c’est soit ça passe, soit ça casse”. Arrivé dans le “rap jeu” en 2004 via une série de titres postés sur son site internet, celui qui se contenta longtemps de provoquer ses congénères hexagonaux revient faire parler la poudre. Toujours perché dans une dimension parallèle, il choisit cette fois la formule du CD mixé pour exprimer ses névroses, clamer haut et fort son pouvoir, et se laisser aller à un florilège de métaphores plus ou moins perceptibles pour le commun des mortels. Ou quand les époux Bled, en visite dans le Queens, tombent nez à nez avec Mobb Deep

Jouant à fond la carte du gangster francophone, Jean-Marie Beauséjour, en dépit d’un flow quasi-inexistant, vise juste à tous les coups ou presque. En allant piocher dans les classiques du genre (“Quiet Storm” sur “La Vraie Musique De Nègres” et son refrain obsédant, par exemple) – mais pas seulement: Barry White et Tina Turner sont également conviés à l’ouvrage – pour y poser des textes à la syntaxe et au vocabulaire plus qu’approximatifs, le résultat, qui doit autant aux propos du Roi qu’à son phrasé hypnotique, fait voler en éclat les dernières convenances d’un rap hexagonal à bout de souffle, fatigué de tourner en rond sur lui même. Et si aucun des dix-sept “styles libres” ne s’écarte d’un pouce du triptyque imposé (les armes, la poudre blanche et les CL 600 “montées sur des Pirelli”), l’ensemble vaut surtout pour le formidable exercice de style qu’il constitue, pour la performance aussi malsaine qu’absurde du Roi et de ses acolytes, enfermés dans des thèmes récurrents sans jamais sombrer dans la redite. Après une rapide mise en condition, qui s’étonnera de voir débarquer “la petite négresse en bicyclette volée/ en plus à l’arrière il y a un banc pour bébé”? Pas plus lorsque Ugoboss nous met en garde: “t’accumules du retard sur le paiement/ on t’enlève ton stress”. Mais que les fanatiques qui suivent les pérégrinations du Montréalais depuis le début se rassurent, le spécialiste ès beef n’oublie pas ses premières amours, défie les trois-quarts du rap français “fruité” et gratifie Booba d’un diss-track entièrement dédié (“Garde Le Kalashnikov”: “Dans la rue si tu veux on fera comme 2 Pac et Biggie/ Mais moi je finirai plutôt comme 50 Cent et G-Unit/ Et toi comme Ja Rule et Murder Inc.”)

A la fois pathétique et génial, le VRP de l’hydroponique affirme encore un peu plus son excentricité charismatique, bien entouré de partenaires au moins aussi louche que lui. Avec ses instrumentaux connus de tous et dans un format accessible (les pistes dépassent rarement les trois minutes), ce CD mixé, fortement addictif pour les uns, rédhibitoire pour les autres, constitue une bonne porte d’entrée dans l’univers du “gangster et gentleman”. A noter qu’il s’accompagne d’un DVD qui achève de donner toute sa dimension au personnage, dans la lignée des “Mathématiques du Roi Heenok” sorti par Kourtrajmé en début d’année: avis aux amateurs de “pistolets illégaux”, de blunts et de berlines de luxe

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