Pole – “Steingarten”

Pole – “Steingarten”

Steingarten[Album]
12/03/2007
(Scape/La Baleine)

Comme dans le domaine scientifique et médical, le monde de la musique voit parfois se profiler de nouveaux horizons grâce à une simple erreur humaine ou technique. C’est en effet à une mauvaise manipulation d’un ingénieur du son jamaïcain que nous devons la création du dub en 1968. C’est aussi à cause d’un filtre défectueux (de la marque Waldorf 4-Pole, vous allez saisir la subtilité…) que Stefan Betke a.k.a Pole (vous avez v…? Ok…) inventera presque accidentellement le style click’n’cut au milieu des 90’s. Ce mélange de dub minimal et d’electronica, comme parasité d’électricité statique, inspirera par la suite les travaux de nombreux artistes (To Rococo Rot, Matmos, Aphex Twin, Plaid ou Two Lone Swordsmen parmi tant d’autres) et sera analysé en profondeur par Pole lui-même sur ses trois premiers albums

Pour son quatrième opus, Betke délaissera quelque peu le genre pour s’en aller explorer les possibilités croisées de l’electro-dub et du hip hop, en compagnie du MC américain Fat Jon

Après quatre ans de silence, l’Allemand revient enfin avec “Steingarten”, toujours signé sur son propre label, l’excellent ~Scape (Burnt Friedman, Deadbeat, Mapstation, Cappablack…), et s’engouffre encore une fois dans une nouvelle voie artistique

Rassurez-vous, la musique de Pole n’a pas pour autant sombré dans la grandiloquence pompière du château de Neuschwanstein (qui inspirera le château de Cendrillon à Walt Disney) qu’on voit ici sous un manteau de neige sur l’artwork du disque. Le nouveau “Jardin De Pierre” de Betke a sans doute aussi d’architectural sa rigueur et son sens de l’espace, mais ses compositions brillent surtout par leur sobriété et leur minimalisme éclairé

L’electro-dub de Pole est aujourd’hui dépouillé jusqu’à l’os, débarrassé de tous ses oripeaux. On pourrait même presque dire que le silence est devenu un instrument comme les autres dans la manière de composer du Berlinois. Une façon de voir très allemande si l’on en croit les travaux de ses compatriotes de Rhythm&Sound, mais quand le duo s’arrange pour garder une certaine chaleur, Stefan Betke assume définitivement l’austérité de sa musique. Ses rythmiques sont d’une froideur minérale (d’où le titre de l’album?), ce qui ne les empêche aucunement de vous transpercer comme un vent humide traverse vos vêtements. Sous une apparente simplicité, les beats tissent une toile où vous finirez forcément par vous empêtrer, poussé par une basse martiale et des claviers spartiates

Le dubtronica de Pole trouvera donc certainement le plébiscite des fans des artistes suscités ou de ceux de Four Tet, Matthew Herbert ou Trentemoller. Vous allez me dire que ça ratisse large, et je vous répondrai que le contenu de “Steingarten” aussi, sans pour autant s’adonner à des bassesses putassières

Car, sans avoir l’air d’y toucher, Pole sait faire une musique qui s’adresse autant au corps (cf. les réminiscences acides de “Jungs” ou la deep house minimale de “Düsseldorf”) qu’à l’esprit (“Winkelstreben” et ses strates de guitares à la manière d’un Fennesz), il est donc normal qu’il puisse rallier un public assez divers à sa cause. Et des pépites comme “Warum” et son groove discret et lancinant ou le très joli “Pferd” qui clôture cet album devraient encore aisément grossir les rangs des initiés. On n’y attend plus que vous

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