Little Simz – ‘Grey Area’

Little Simz – ‘Grey Area’

Album / Age 101 / 01.03.2019
Hip hop


De Jay Z à Kendrick Lamar, de J. Cole à Damon Albarn, la jeune Little Simz affiche depuis quelques années un cercle d’admirateurs plus que prestigieux. En passe de devenir la nouvelle tête de proue du hip-hop britannique, il ne manquait à la londonienne qu’un troisième album hautement plus accessible que ses prédécesseurs pour passer le cap et marquer les esprits. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’anglaise a décidé de mettre les petits plats dans les grands pour son retour en 2019. Car si ses précédents disques – A Curious Tale of Trials + Persons (2015) et Stillness in Wonderland (2016) – avaient attisé la curiosité sans totalement convaincre, ce nouvel album devrait sans mal rectifier le tir et positionner la rappeuse à une hauteur d’affiche amplement méritée, elle qui rappe depuis l’âge de 9 ans et a fondé son propre label à seulement 21 ans.

Ce Grey Area est un concentré parfait de modernité et d’influences old school. Produit quasi intégralement par le londonien Inflo – son ami d’enfance – l’album fait la part belle à un duo basse/batterie de première classe sur lequel viennent par-ci par là s’imbriquer avec justesse quelques arrangements de synthétiseurs, cordes, pianos et guitares. Le disque frappe par sa richesse musicale en allant piocher dans des influences parfois punk (Offence), parfois R’n’B/Soul/Lounge (Selfish), voire carrément horrifiques et cinématographiques (Venom), et même dans des sonorités qu’on penserait tout droit venues du continent asiatique (101 FM). Cette pluralité artistique permet ainsi à la rappeuse de faire évoluer son flow jusque là essentiellement réputé pour se technicité, qu’elle a toujours maîtrisé mais jamais au détriment du fond. Little Simz sait trouver les mots et aborde ici tous les questionnements propres à son jeune quart de siècle atteint, comme à sa popularité grandissante. Elle assume par exemple son énorme égo, et se défend de travailler dur et de ne pas avoir volé sa réussite (‘All this here is worked for, not inherited‘ dit-elle sur Selfish). Elle parle aussi de célébrité sans nier le revers de la médaille souvent imposante qui l’accompagne (Pressure), de désillusion amoureuse (Sherbet Sunset), et du problème récurrent des armes à feu dans des quartiers pauvres qu’elle connaît bien (Wounds).

Sur Grey Area, Little Simz aborde sa vie, ses propres névroses en faisant son auto-thérapie et, par la même occasion, en profite pour fermer quelques bouches. Celles d’une critique qui jugeait jusqu’alors son art parfois trop élitiste, mais aussi celles du milieu hip-hop himself ou la gent féminine est encore trop peu représentée. ‘I’m a Boss in a fucking dress‘ argue-t-elle sur Boss, ‘I said it with my chest and I don’t care who I offend‘ poursuit-elle sur Offence. Avec énergie et maîtrise, la jeune londonienne s’affirme et sort son album le plus mature et le plus abouti. Un disque qui s’inscrit d’ores et déjà dans la lignée de tous ceux qui ont contribué à l’émancipation des femmes dans le milieu hip-hop. On pense notamment au mythique The Miseducation of Lauryn Hill sorti il y a déjà un peu plus de 20 ans, et dont Grey Area semble indéniablement être l’un des derniers rejetons.

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ECOUTE INTEGRALE

A ECOUTER EN PRIORITE
Offence, Boss, Selfish, Wounds, Venom, 101 FM, Pressure, Sherbet Sunset


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