Jackson & His Computer Band – “Glow”

Jackson & His Computer Band – “Glow”

jacksonAlbum / Warp / 02.09.2013
Opéra club

Huit ans après sa sortie, ”Smash” reste incontournable, sans la moindre ride, par la grâce d’une production sans âge et des compositions de génie, mêlant chaos sonore et cisaillements chirurgicaux à un dédale d’images kubrickiennes. Clairement, ce premier album fit école et certains n’auraient sans doute jamais existé sans lui, Justice en tête. Pour autant, Jackson créa l’addiction sans jamais daigner servir de nouvelle dose. Après un tel chef d’oeuvre, le Français nous laissa orphelins et prisonniers d’une discographie géniale mais trop mince. Tout juste se donna t-il la peine de remixer ses amis (Justice, Kavinsky, Slice & Soda, Kap Bambino ou Mungo Park), sans que cela suffise à nous rassasier. S’il a longtemps fait figure d’arlésienne, ce deuxième opus fut surtout préparé, imaginé avec soin par un producteur bien loin de vouloir surfer sur le buzz. En s’isolant ainsi, Jackson conçut un album global, autant destiné à nos platines qu’à la scène. De fait, ”Glow” jouit d’une puissance incomparable avec son prédécesseur.

Sans renier certains de ses gimmicks – ses breaks inattendus, sa rythmique omniprésente et les voix déconstruites – Jackson quitte l’iDM pour des paysages plus variés. ”Glow” flirte tour à tour avec le dubstep, l’indie rock et la techno, un mélange plus ou moins savant et réussi. En effet, contrairement à ”Smash”, ce deuxième album connait de sérieux ratés: à ce titre, ”G.I Jane (Fill me Up)”, ”Blood Bust” et ”Pump” déçoivent. Les deux premières sont significatives de l’importance qu’a pris le live  dans l’esprit du producteur. Très turbines, sans véritable aspérité, celles-ci seront à même de déchaîner le festivalier ivre. On repassera pour les nuances. Quant à elle, ”Pump” nous rappelle les défauts de Mr Oizo, musicien bien moins subtil que son alter-ego réalisateur.

Fort heureusement, Jackson reste un auteur fou dont l’esprit diverge naturellement vers des dédales de son. Adepte de la zizanie, il se lance dans des symphonies électroniques grandiloquentes d’une beauté ravageuse. ”Orgysteria” offre ainsi plus de six minutes de voyage hallucinogène, certainement le point culminant de ce disque. En guise de ballade pop, ”Memory” amène un peu de douceur salvatrice. Enfin, ”More” nous remémore à quel point le producteur est capable de nous perdre dans ses multiples contre-pieds.

Ceci étant dit, l’évolution même de ”Glow” nous divise tant ce dernier ne brille pas par son homogénéité, à tel point que l’on ignore ce qu’il tente de nous raconter. Le génie de ”Smash” résidait dans sa capacité à nous abreuver d’images toutes liées les unes aux autres et, s’il était certes caché derrière ses claviers et ordinateurs, l’aura de Jackson se décelait à chaque pulsation. Paradoxalement, alors que les voix fleurissent de partout, alors que son auteur n’est plus un inconnu, alors que la production et le travail sur les claviers atteignent des sommets, ”Glow” nous semble parfois vide d’essence, pour ne pas dire de sens.

Quelques réminiscences de ses fulgurances d’antan (l’ultime ”Billy”) nous émeuvent mais c’est bien là à peu près tout. Parfois trop rutilant (la patte de Zdar?), l’album manque souvent de raffinement et de détails. Néanmoins, il faut avouer que les attentes nourries autour de celui-ci étaient sans doute démesurées. Par conséquent, ”Glow” est sans doute une réussite, sauvée par quelques éclairs de génie, mais ne semble pas pouvoir être établi comme le digne successeur de ”Smash”. Le plus dur dans l’histoire est d’imaginer qu’il faudra peut-être attendre une décennie avant que son auteur nous propose mieux.

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“Seal”, “Orgysteria”, “Billy”


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