Flying Lotus – ‘You’re Dead!’

Flying Lotus – ‘You’re Dead!’

Album / Warp / 06.10.2014
Hommage éveillé au rêve nu-soul

Presque deux ans, jour pour jour, après la sortie de ‘Until The Quiet Comes’, Flying Lotus revient pour son cinquième album studio, sobrement intitulé ‘You’re Dead!’. Inutile de le cacher, ce nouvel essai du producteur californien est un de ses meilleurs crus. Dans un de ses exercices de style bien propres à lui, il décline une palette de tableaux qui, assemblés, composent un disque sans aucun faux pas.

Dès son commencement, ‘You’re Dead!’ fascine, et évoque la trop sous-estimée expérimentation neo-jazz de Squarepusher, ‘Just a Souvenir’. Très clairement, le thème introductif, distillé en quatre parties, annonce la couleur d’une oeuvre si cérébrale qu’elle en devient physique. Sans respiration, ‘FlyLo’ nous plonge dans une effusion instrumentale à l’esthétique rétro-futuriste, prolongée par l’arrivée de Kendrick Lamar sur le single et tubesque ‘Never Catch Me’. Pour habiller le flow frénétique et habité du rappeur, le producteur dresse une mélopée moelleuse, où s’infusent les cordes d’un piano, soutenues par une section contrebasse-batterie puissante. Accompagné des choeurs soyeux, l’ensemble jouit d’une production redoutable, hautement millimétrée, digne des plus belles heures de l’ère nu-soul de l’ère ?uestlove.

Comme ‘Until The Quiet Comes’ avant lui, ce nouveau disque présente de nombreuses collaborations. Il n’est donc pas surprenant de voir Snoop Dogg apporter sa voix, accompagné par Flying Lotus lui-même sous son alias Captain Murphy. Comme à son habitude, le fondateur de Brainfeeder plonge dans le chaos pour mieux renouer avec la clarté dans la même composition. Toujours à l’aise, l’ex-Snoop Lion distille des lyrics cyniques à souhait et, au final, ce ‘Dead Man’s Tetris’ constitue la transition parfaite, avant ‘Turkey Dog Coma’.

Avec lui, Lotus renoue avec les expérimentations jazz du début de l’album, pour mieux revenir vers les inspirations d’Erikah Badu, déjà entendues précédemment. À ce titre, ‘Coronus, The Terminator’ ne trompe personne, tant la patte de la diva se fait ressentir. C’est également l’une des compositions les plus déjantées, non sans évoquer les tribulations de feu Sa-Ra.

Par la suite, le musicien retrouve ses inspirations de toujours, évidemment picturales. Toujours portée par un onirisme omniprésent, la seconde partie de l’album présente une dimension propice à la flânerie. Il livre ainsi des instrumentaux d’une beauté sublime (‘Ready Err Not’, ‘Moment of Hesitation’), sans aucun doute majeurs, malgré leur brièveté. Et quand les voix reviennent, qu’il s’agisse de la sienne ou celle de Thundercat, c’est pour habiller des compositions baroques, à la rythmique presque inexistante, des évocations fantasmées sans véritable but, si ce n’est celui de troubler, encore plus.

Au final, Flying Lotus revient pour le meilleur, après un ‘Until The Quiet Comes’ pour le moins désinvolte, si ce n’est arrogant. Ce cinquième opus trônera en bonne place dans sa discographie, avec ‘Cosmogramma’, trop souvent oublié malgré sa facture luxueuse. Parfois critiqué en raison d’une promotion souvent imposante, le trentenaire livre, enfin, un album complètement digne de son talent, inspiré, sincère et puissant.

‘Never Catch Me’, ‘Coronus, The Terminator’, ‘Moment of Hesitation’


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