Bachar Mar-Khalifé – “Oil Slick”

Bachar Mar-Khalifé – “Oil Slick”

bach180Album
(InFiné)
27/09/2010
Avant garde

InFiné prend une direction artistique inattendue. En passant illégalement la frontière de la musique classique, en faisant cohabiter Agoria, Danton Eeprom ou Clara Moto avec Aufgang, pourquoi ne pas la franchir définitivement avec Bachar Mar-Khalifé, libanais d’origine qui propose ici un album avant-gardiste canonisant le métissage entre piano classique et culture arabe. Bercé par la voix et les compos de son père Marcel Khalifé, il officie dans plusieurs orchestres importants avant de se pencher sur des projets à tendance électro aux côtés de Francesco Tristano avec Carl Craig et Moritz Von Oswald. Il s’épanouit aux percussions et au piano avec le bassiste Alexander Angelov, le batteur Aymeric Westrich, et son frère pianiste Rami Khalifé: trois musiciens ayant participé à “Oil Slick”, ce projet qui dégage forcément en arrière-plan une odeur de Aufgang, les deux derniers cités en étant les co-fondateurs.

Preuve en est ce premier morceau, “Progeria”: un jazz oriental rendu haletant par un piano qui court, entre mélodie gentille et désobéissante, presque agressive, distancée plus loin par ce chant arabe qui fait presque anachronisme. Un choc surprenant qui termine sur des expérimentations dark, révélatrices de l’ouverture d’esprit de Bachar. Construit comme une pièce de jazz, les six morceaux prennent leur temps pour se développer et aiment partir à gauche quand nous auditeur allons à droite. “Distance” est une somptueuse ballade cristalline dévergondée par une batterie hésitante, le tout tracté par les gémissements de Bachar qui emballe littéralement le morceau avec un simple fredonnement alimentant cette montée perpétuelle. Son amie palestinienne Lita Jana lâche ensuite sa prose sur le poème “Around The Lamp” se limitant à quelques mots qui flirtent avec autant de notes. Une pause méritée après les deux excellents premiers titres.

Cependant, deux morceaux auront sans doute du mal à captiver: “Marée Noire”, slam très sombre plombé par l’apparition d’un ridicule vocoder, et le sans intérêt “NTFntf'” aux dix minutes de vent, de cordes grinçantes et de percus déboussolées évoluant dans un décor expérimental ressemblant à de l’improvisation. Avec “Democratia”, Mar-Khalifé dénonce et place son message politique à coup de name-dropping, ceux de prisonniers politiques incarcérés pour la défense des libertés. Un récit sincère qui part en folklore de rue, en s’écartant de la ligne de conduite tracée jusqu’ici (et donc susceptible de dérouter), mais le chant en arabe possède un certain charme, surtout lors de ce final festif.

Sans être grotesque, “Oil Slick” dérange par son côté hybride de musique de chambre moderne servant de vecteurs aux messages politiques et personnels de Bachar Mar-Khalifé.

En écoute

Disponible sur
itunes20


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