On y était ! Retour sur le Primavera Sound 2016

On y était ! Retour sur le Primavera Sound 2016

Le Primavera Sound Festival aurait pu nous proposer n’importe quelle affiche cette année, même celle d’un Fnac Live, nous nous y serions rendus avec le même enthousiasme qui nous habitait lors des précédentes éditions, ne serait-ce que pour fuir les trombes d’eau qui noyaient le moral – si ce n’est plus – de la majorité des français. Parce que de l’autre côté de la frontière, l’humidité restait gentiment à sa place, baignant le port du Parc Del Forum, laissant entendre ses clapotis quand les décibels des six scènes du festival – à la qualité sonore nettement supérieure qu’à l’accoutumée – voulaient bien se taire. Ce qui n’arrive absolument jamais durant les trois jours de cet inimitable rassemblement de mélomanes qui, cette année encore, n’ont pas regretté d’avoir pris leur pass en avance.

Aussi riche, dense et variée que d’habitude, la programmation 2016 s’est particulièrement distinguée par les quelques têtes d’affiche venues la couronner. Parfois dispensables jadis, elles étaient immanquables cette année : des revenants LCD Soundsystem toujours parfaitement huilés, à une impressionnante PJ Harvey entourée d’une formation monstre, tous – ou presque si on omet des Last Shadow Puppets peut être un peu trop alcoolisés – ont pleinement rempli et assumé leur rôle. Au même titre, Tame Impala restera dans les mémoires pour le meilleur – la perfection vocale de Kevin Parker est décidément bluffante – comme pour le pire devenu meilleur lui aussi lorsqu’un problème technique est venu interrompre la communion ‘Eventually’, laissant le public patienter en répétant le refrain en choeur jusqu’à ce que le groupe ne reprenne de plus belle, à la seconde près. Ce même public justement qui, pendant le concert d’un Radiohead taille patron (photo ci-dessous), entonnait par coeur les tubes les plus grands (et les plus rares en live) des Anglais, pour mieux se murer dans le silence sur les ballades les plus émouvantes et épurées attaquées par Thom Yorke. Une messe impressionnante.

Mais le Primavera Sound Festival n’est pas qu’une réunion de grands pontes. C’est surtout le rendez-vous annuel d’une cohorte de groupes alimentant ensemble les colonnes des médias musicaux du monde entier. A l’ombre des géants, on a néanmoins décelé chez certains comme une envie de prendre leur place. Ainsi, pas de doute que la sensibilité communicative de Daughter, la transe installée de la première à la dernière note de Suuns, la science rythmique toujours aussi sidérante de Battles, comme la redoutable énergie live de Jehnny Beth (Savages) mériteront eux aussi un jour un créneau nocturne sur une des grandes scènes de l’événement. Ou pas, ce qui nous permettrait d’apprécier plus longtemps leur musique au milieu d’une jauge à taille plus humaine, comme ce fut le cas pour l’incroyable Ty Segall qui, très à l’aise dans son seul rôle de chanteur, a mis LA touche finale au pan rock n’roll du festival en invitant sur scène un fan du premier rang à qui il avait confié le micro peu de temps avant. Sûr de lui, le gaillard s’est particulièrement distingué, jusqu’à pousser l’hyperactif californien à prendre sa place et faire de lui-même la coqueluche du public (voir la vidéo en fin d’article).

D’autres, totalement débarrassés d’ambitions trop débordantes, n’ont pas manqué non plus de défendre bien haut leurs couleurs. Ce fut le cas du jeunot Car Seat Headrest dont les compositions ont suffi à conquérir l’audience, de Andy Shauf dont la succulente pop folk ne pouvait trouver meilleur écrin que l’Auditorium, d’une Julien Baker émouvante mais faussement fragile, de Dam Funk inégalable quand il s’agit d’installer le mood parfait à l’heure de l’apéro, ou d’Action Bronson dont l’efficacité live repose finalement en grande partie sur la qualité de ses productions. Puis il y avait les vieux de la vieille : les infatigables Meanies auteurs de trois concerts en trois jours, Richard Hawley définitivement maître en matière de pop anglaise, un Unsane sur le retour mais au pilotage d’une véritable machine de guerre, et Drive Like Jehu (photo ci-dessous) qui – le temps d’une petite heure – a réveillé les plus beaux souvenirs des années 90, nous laissant même rêver le temps d’un instant de voir Fugazi réapparaître un jour à sa place.

Beak, John Carpenter, Titus Andronicus, Tortoise, Dinosaur Jr, Animal Collective, Shellac, Moderat, Sigur Ros, Beach House, Deerhunter, Pusha T, Thee Oh Sees, et Explosion In The Sky sont malheureusement passés entre les mailles de notre filet. Contrairement à White Fence, Boredoms et Parquet Courts (sic) dont on se serait finalement bien passés. Tout comme de Brian Wilson qui, s’il a réveillé l’affect d’un bon nombre d’âmes nostalgiques, a parfois frôlé le pathétique. Mais pas de quoi ternir une édition exceptionnelle en attendant de guetter déjà du coin de l’oeil l’affiche d’un Primavera Sound 2017 désormais dans l’obligation de poursuivre sa formidable ascension dans le coeur des amoureux de musique d’Europe et d’au-delà.

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1 Commentaire
  • fel
    Posté à 20:15h, 16 juin Répondre

    Pour l’avoir vécu, je n’ai pas eu l’impression que le break de 10mn de Tame Impala était la conséquence d’un problème technique, ça m’a semblé complètement délibéré. Moment magique anyway

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