Interview – Chokebore, a part from night

Interview – Chokebore, a part from night

En 2003, Chokebore donnait son dernier concert à Paris, sans même que le public présent ce soir là au Nouveau Casino sache qu’il n’y en aurait plus jusqu’à nouvel ordre. En effet, peu de temps après, les quatre décidaient un hiatus à durée indéterminée qui allait s’éterniser jusqu’à ce début d’année 2010 ou Chokebore a enfin rebranché les guitares. Et à croire l’engouement suscité par ce retour aux affaires, ce groupe phare de la scène indépendante des nineties n’a jamais été oublié par son fidèle public. 19 février, Chokebore est donc en ville pour un concert à La Maroquinerie. L’occasion inmanquable de refaire le point avec ceux qui faisaient la couverture du numéro 0 de Bokson en 1998, là ou toute notre aventure à nous a commencé. A suivre, interview et trois titres live en exclu pour Mowno.
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INTERVIEW EN INTEGRALITE

Vous avez déjà fait quelques dates pour cette tournée de reformation. Etes vous satisfaits? Le feeling est-il le même qu’il y a sept ans?

Christian: Oui, c’est comme faire du vélo. C’était un peu rouillé au début, mais finalement c’est pareil. La magie est toujours là.
James
: On pratique beaucoup la magie… dans les loges! La magie blanche, hein…

La question est certainement devenue un classique mais je me dois de vous la poser: pourquoi et comment avez vous décidé de remettre Chokebore sur les rails?

James: Moi et mon frère, on habite à Berlin, et Troy est venu nous voir. Il nous a demandé si on était partant pour refaire des concerts, et on lui a dit oui, qu’il fallait qu’on réessaye. Je pense que c’était tout simplement le bon moment.
Troy:  Trois d’entres nous étions là-bas au même moment, donc on a commencé à jouer ensemble de la guitare acoustique, et on a bien senti qu’il fallait qu’on continue.

Ca s’est fait de façon assez simple finalement…

Ouais voilà, ça a été naturel.

chokeDurant ces derniers mois, il y a eu pas mal de reformations de groupes, mais certaines d’entre elles n’ont pas toujours été convaincantes. Comme si la démarche était plus intéressée que réellement motivée… Craignez vous que les gens vous associe trop vite à ces groupes là?

Non… Depuis le temps qu’on joue ensemble, tout ceux qui connaissent Chokebore comprenne notre musique, notre façon de l’appréhender. Nous sommes vraiment très indie…
James: Jusqu’à présent, le public qui a répondu présent pendant cette tournée a été très amical, très chaleureux à notre égard. Il nous a plutôt soutenu qu’autre chose…
Troy: Qui sait ce que pensent les gens, mais on n’a pas du tout eu cette impression.
Christian: J’ai entendu, à Genève notamment, que certains pensaient qu’on jouerait que dans des grosses salles et que, du coup, on serait moins disponible pour le public… Ils s’inquiétaient qu’on soit devenus trop gros, qu’on ait changé… Mais, ne t’en fais pas, Chokebore trop mainstream, ça ne risque pas d’arriver (rires)…

C’est cette crise du disque qui fait que les gens se disent que les groupes se remettent à tourner pour l’argent, parce que les albums ne se vendent plus…

Troy: En tous les cas, je peux t’assurer qu’on ne gagne pas grand chose en ce moment.
Christian: Ca n’a jamais été une question d’argent, et ça ne l’est toujours pas aujourd’hui.
James: Pour certains groupes, c’est sûrement vrai. Mais tu sais, quand tu tournes intensément depuis un moment, au bout du compte tout le monde a besoin de voir, entendre et vivre autre chose. On a joué ensemble pendant quatorze ans pour finalement en prendre six pour se reposer. Du coup maintenant, on apprécie beaucoup le fait de se retrouver, mais c’était aussi très bénéfique d’avoir vécu ces six années sans rock n’roll! Mais on est très heureux de reprendre aujourd’hui.

Donc rien était définitif quand vous avez décidé d’arrêter Chokebore en 2003?

Christian: Non, c’est juste arrivé comme ça. Personne n’a décidé, et personne ne savait que ce concert à Paris en septembre 2003 serait le dernier. Le moment était simplement venu de faire une pause. Tout comme maintenant, c’est le moment de rejouer ensemble.
James: Qui sait, la semaine prochaine, ce sera peut être le moment pour une nouvelle pause! (rires)

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Chacun d’entre vous a t-il trouvé un second souffle dans d’autres projets? Dans quelle mesure aller voir ailleurs vous a redonner envie?

Troy: Ce n’était pas seulement pour trouver un second souffle, mais aussi pour jouer un autre style de musique. Chokebore est assez particulier, c’est du rock qu’on tente de rendre le plus possible intéressant. Mais j’entends aussi d’autres petites chansons dans ma tête qui doivent voir le jour dans un autre contexte. Désormais, pouvoir s’exprimer sur ces deux plans en même temps, c’est génial, c’est un bon équilibre.

Vous avez dit que les tournées interminables ont probablement condamné Chokebore en tant que groupe. Comment expliquez vous que vous n’avez pas su mieux gérer cela?

Et bien, nous sommes humains. On a vécu ensemble dans un camion pendant dix ans, sans gagner d’argent. A la fin de notre dernière tournée, on n’était pas plus riche qu’au moment de débuter la première. On ne se plaint pas, c’était génial de faire de la musique pendant tout ce temps, mais c’est physiquement exténuant de faire ça jusqu’à ce point. On a tourné aux Etats Unis avec parfois soixante dates d’affilée. Ca, ça tuerait n’importe qui. Et au bout d’un moment, tu sais qu’il faut te reposer pour ne pas t’écrouler.
James: Ouais, sans les six dernières années, on aurait tous beaucoup plus des sales gueules que maintenant!
Troy: On serait détruits. Ca te détruit physiquement.
James: Mentalement aussi.
Troy
: A moins d’être un énorme groupe et de dormir dans des hôtels quatre étoiles. Nous on passait nos nuits dans le camion. C’était super, mais pas l’idéal pour se reposer.

choke21A part le son électrique, qu’est ce qui vous a le plus manqué durant ces dernières années?

Troy: La batterie. Et puis mes amis aussi.

L’énergie donc…

Oui, l’énergie du groupe. Quand tu fais partie d’un groupe et que la musique que tu joues est de qualité, tu ne peux pas t’attendre à vivre la même chose à chaque nouveau projet. Ce que nous avons vécu avec Chokebore depuis le début, c’est quelque chose d’assez exceptionnel. Cela explique tout le plaisir que nous avons à nous retrouver ensemble à nouveau.

Vous avez sorti une compilation spécialement pour cette tournée. Pouvez vous expliquer pourquoi vous avez pris cette initiative?

James: Premièrement, étant donné que nous avons été séparés pendant longtemps, je ne pense pas qu’on puisse encore trouver des disques de Chokebore. Donc, on a trouvé cool de pouvoir proposer quelque chose aux gens, qu’ils puissent repartir des concerts avec du son. Apparemment, le public en est content.

Et avez vous eu l’opportunité de composer de nouveaux morceaux pendant vos dernières répètitions?

Christian: On a seulement répété pendant trois semaines. Un mois peut être, tout au plus. Donc on a seulement eu le temps de ré-apprendre les morceaux qu’on va jouer ce soir, et sur toute cette tournée. Le reste viendra ensuite: de nouveaux morceaux, bosser avec un nouveau label…
Troy
: On a commencé à travailler sur un ou deux trucs… Mais on se consacrera plutôt à la composition cet été, on aura beaucoup plus de temps disponible pour cela. On a tenté quelques trucs, on a ressorti nos vieux dossiers, des morceaux à moitié écrits et qu’on va finir… On va aussi repartir de zéro, écrire des choses totalement nouvelles. Tout cela se fera pendant l’été.

On peut donc s’attendre à un nouvel album bientôt?

Oui, oui, on va travailler dessus. On a commencé à y réfléchir cette semaine en fait, donc je crois que vous y aurez droit.

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Je suppose que tout le monde dans le groupe a suivi la carrière solo de Troy. Avez vous été surpris par ses disques? Les considérez vous comme la suite logique de ces derniers souhaits exprimés en 2003 avec Chokebore?

James: Je n’ai pas vraiment écouté ses disques, mais quand il est venu jouer à Berlin, je suis venu le voir, peut être six ou sept fois… C’était de bons concerts, avec de la bonne musique. Mais c’était bizarre de le voir sur scène et de ne pas être à ses côtés. Mais je n’ai pas de regrets, j’ai vraiment apprécié de passer ces six dernières années sans musique, sans loge, sans fans. C’était merveilleux, mais je suis aussi très heureux d’être ici maintenant. C’est important dans la vie de faire des choses différentes. Pour revenir à Troy, j’aime bien sa musique, c’est un bon chanteur.
Troy: Merci… Je suis donc un guitariste de merde!
James
: Non, non, c’est un bon guitariste! Peut être pas tellement bon chorégraphe en revanche…

Le virage fut un peu surprenant, comme pour John et A Newborn Riot Of Dreams… Vous en aviez besoin…

Troy: Si cela avait été pour faire la même chose qu’avec Chokebore, alors il fallait que nous continuions. La seule raison valable pour se lancer dans un nouveau projet, c’est de pouvoir exprimer une autre facette de ta musique, ou de ton art. Pour moi, il s’agissait d’avoir un son plus acoustique, plus silencieux, plus subtil, plus détaillé. Et toi John?
John
(qu’on réveille semble t-il, ndr): Je voulais juste faire des choses en dehors de la configuration normale d’un groupe qui joue pour ses fans, écrire des choses plus longues aussi. Et simplement voir ce qu’on pouvait faire avec seulement une guitare.

Certains musiciens ne pourraient pas travailler tout seul. Ils ont besoin d’être dans un collectif pour avancer…

Troy: Oui, il y en a qui n’aiment pas ça… D’autres qui préfèrent… Moi, je suis vraiment content de retrouver Chokebore. J’avais besoin d’un équilibre, la musqiue de Chokebore me manquait pendant que je tournais pour Troy Von Balthazar. Chokebore, c’est Chokebore, aucun autre groupe ne sonne comme nous. Ce que je ne pouvais pas trouver ailleurs me manquait. Je suis épanoui maintenant.

Tu as un nouvel album solo prévu pour bientôt…

Oui…

A quoi pouvons nous nous attendre?

Ce sera meilleur, plus intéressant, plus joli que le premier album! C’est beaucoup mieux. Les morceaux sont meilleurs, mieux écrits, les paroles aussi. Voilà, c’est un peu de bonheur pour tous, sauf pour les gens malheureux. Ca sonne toujours lo-fi parce que ça me plaît toujours beaucoup. C’est moitié lo-fi, moitié orchestré.

Pour finir, la question habituelle chez Mowno: quel disque a changé votre vie à chacun d’entre vous?

Christian: My Bloody Valentine… “Isn’t Anything”. Je n’avais jamais entendu un tel son auparavant… Ce sont eux qui l’ont produit. Le changement, la perspective et les possibilités des sons que tu peux faire avec juste des guitares et une batterie: pour tout cela My Bloody Valentine a été un groupe important pour moi.
Troy: Pour moi c’est “Fulfillingness’ First Finale” de Stevie Wonder. Parce que… J’étais en train de faire l’amour à une fille, elle faisait tourner ce disque en fond sonore, dans une autre pièce, et j’ai arrêté…

De faire l’amour?!

Ouais! Je suis allé dans la pièce à côté et je me suis juste posé pour écouter l’album en entier. C’était tellement merveilleux.
James: Waouh.
Troy: Ca a juste instantanément changé ma perception de la musique.

Et elle s’est barrée…

Ouais, elle ne m’aimait plus beaucoup après ça! (rires)

Et toi James?

James: Elle est dure cette question. Le dernier disque à avoir changé ma vie, ça devait être il y a très très longtemps. Du coup, je ne m’en rappelle plus. Oh! C’était quoi cet album de George Michael ? C’était bien ça…
Troy: “Faith”?
James: C’était celui là le bien?
Troy: “Gotta have faith…”
James: Je mettais ça dans ma bagnole à l’époque… Non, je n’ai pas le souvenir d’un disque qui ait changé ma vie. A part, genre à douze ans, quand j’écoutais les Dead Kennedys, ou un truc comme ça. Mais bon, ça c’est quand j’avais douze ans, en train de me défoncer dans la salle de bain…
John: En faisant l’amour à une femme…
James: Non, je faisais pas l’amour à une femme, j’étais juste là à me mettre stoned dans la salle de bain en écoutant les Dead Kennedys.

John?

John (toujours à peine réveillé, ndr): Euh… Je ne sais pas, j’ai du mal à isoler un seul album… Il y en a plusieurs des Smiths mais c’est dur d’en choisir un…
James: J’aurais pas dû dire Dead Kennedys… J’aimerais vraiment pas réecouter les Dead Kennedys un jour!


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