Interview : Burning Heads (06-2004)

Interview : Burning Heads (06-2004)

On connaît bien Burning Heads mais très peu Alif Sound System. Pouvez vous vous présenter (naissance du groupe, passé musical…)?

Alif Sound System (MDB): Le groupe est né en 2002 après que MDB et VDZ Break aient travaillé ensemble pendant 3 ans. MDB est issu du hip hop alors que VDZ des free parties. La rencontre s’est faite par le biais d’amis qui connaissent des amis qui connaissent des amis… Le mélange donne Alif, de l’electro hip hop raggater. Depuis 2 ans, on tourne pas mal, on est aujourd’hui sur notre deuxième tournée avec les Burning Heads. Nous avons plusieurs dates à notre actif, que ce soit en France ou même en Europe. On a notamment fait la Cigale avec Lofofora, la première partie de Zebda, quelques festivals… Donc pour ne pas me répéter, le groupe se compose de 4 membres: Dj Piettro, VDZ Break aux machines, Vins au son et moi même, MDB, orateur mc. J’ai fait mes débuts au sein des Nasty Boys en 1989.

Comment s’est présentée cette idée de collaboration entre les Burning et Alif?

Burning Heads (Pierre): Thomas, notre batteur a rencontré les gens d’Alif dans une teuf dans le sud de la France. Alif nous a alors proposé un titre à composer en commun, on s’est dit qu’on pouvait peut être essayer d’en faire deux, et sortir un maxi…

ASS: La première tournée commune s’est très bien passée, tellement bien que tous les soirs ça finissait en freestyle. De là sont nés deux morceaux plus ou moins complets. De retour chez nous, on a composé un morceau en laissant de la place pour les Burning Heads, on leur a proposé d’y prendre part, et de là est née l’idée d’en faire plus et l’album est arrivé.

Yelen a-t-il été tout de suite ouvert au projet?

BH: On a alors soumis l’idée à Yelen, en leur disant qu’ils n’étaient pas obligés d’adhérer, mais que d’une manière ou d’une autre nous allions sortir quelque chose de tout ça. Yelen nous a alors proposé d’en faire un disque avec au moins huit titres et de le sortir comme un nouvel album, une énième expérience chez les Burning, un caca nerveux de plus parce qu’on est des sales gosses et qu’on fait ce qu’il nous plait.

Quels sont les principaux points communs qui vous unissent?

BH: Thomas a trouvé que ce sound system avait un comportement punk, une démarche proche de la notre. Effectivement en regardant bien, les morceaux d’Alif sont construits comme des chansons même si c’est de l’electro.. Il y a déjà des guitares saturées, des refrains et des mélodies qu’il faut un peu chercher derrière un mur de distorsion et de boucles breakbeat à 220 BPM, mais elles sont bien là. Nous faisons du punk rock depuis longtemps, mais on aime beaucoup ce genre de zique aussi. Ca nous cause autant qu’un bon disque des Circle Jerks ou des Bad Brains.

ASS: Musicalement on écoute à peu près les mêmes trucs, qu’ils soient hip hop, jungle… Il est vrai que je n’ai pas de connaissances en punk mais je m’y suis mis et j’avoue que nos revendications sont communes.

On note de réelles ressemblances avec Assassin. Est-ce un groupe qui relie vos deux générations?

BH: Certainement. J’ai trippé sur les premiers maxis d’Assassin. A l’époque, on trouvait que c’était une bouffée d’air frais dans le paysage hip hop français, avec des vrais textes, et un engagement. Assassin était à l’époque un des rares “groupes” à composer leur musique, et pas seulement piller des samples sur des CDs… Certains titres d’Assassin traversent les époques sans faiblir. Comme tout bon disque d’ailleurs, ça raccroche souvent plusieurs générations…

ASS: Je ne sais pas si c’est le cas mais on me dit souvent que mon flow ressemble à celui de Squat. C’est vrai, ça me flatte, car j’aime beaucoup ce qu’il fait mais notre musique est assez unique. Regarde autour et tu ne trouveras pas d’autres groupes avec notre son. Ce n’est pas de la prétention, je ne dis pas cela sans respect envers tous ceux qui font cette zique. Cette ressemblance est involontaire, quoi que je me demande si je n’ai pas sa rage et son engagement.

Qu’est ce qu’Alif a le plus appris aux côtés des Burning Heads?

ASS: Honnêtement, l’esprit de groupe, le respect des autres musicalement, et que le shit à grosse dose donne mal à la tête.

Est-ce que cette expérience contribue à l’éternelle jeunesse des Burning Heads?

BH: Je ne sais pas. Mais je suis content d’avoir fait ce disque. BHASS, c’est pour moi comme un nouveau groupe en plus des Burning Heads, avec les défauts et les qualités que ça comporte. C’est un peu notre premier album electro-punk. Voilà, on aime ça aussi. Je ne sais pas si il y en aura d’autres, mais je suis content qu’on ait déjà celui là.

Est ce que ce projet lance définitivement la carrière d’Alif Sound System?

ASS: Pas du tout, c’est un projet comme un autre et j’espère, si Dieu le veut, que d’autres projets se feront avec d’autres groupes. On prend seulement du plaisir sur scène sans porter d’attention au reste.

Le punk est aujourd’hui rentré dans les moeurs, ce qui n’est pas le cas de l’electro. Est-ce aussi pour retrouver le goût de l’anti conformisme que les Burning Heads se sont lancés dans ce projet?

BH: Tu dis que le punk est rentré dans les moeurs. C’est faux. Excuses-moi, je joue peut-être sur les mots, mais pour moi ce qui passe sur Skyrap de merde, ou sur les autres radios pourries françaises, ce n’est pas du punk, ou alors à quelques exceptions… Mais, t’as déjà entendu Black Flag sur France Inter? Descendents sur Bouyg-F1? Non, c’est à chaque fois une sale copie qu’on entend. Effectivement, certains kids n’y voient que du feu, c’est tellement bien maquillé. Mais il y a souvent tellement de fric dépensé en amont pour que ça vende, que ça finit toujours par sentir le cadavre… Il ne tient qu’à vous fanzines, et nous groupes qui ne bénéficions pas de se soutien médiatique de ne pas se faire leurrer. Et de continuer d’expliquer qu’un autre monde existe. Tant mieux pour ceux qui nous rejoignent… Le temps passe et effectivement beaucoup de styles sont digérés un peu vite par des majors, disques ou médias, quand c’est pas les deux à la fois… Genre M6 de merde qui devient producteur et diffuseur de ses propres étrons musicaux. Mais à chaque fois, c’est une version édulcorée qui est proposée au public. On prend les bases, on garde les grandes lignes, on habille le tout avec un designer du moment, et on fait croire… L’important pour ces gens sans scrupules, c’est de faire croire. Je n’ai pas l’impression qu’on touche au grand public avec ce disque, je ne pense pas qu’on ait fait dans la dentelle, et je ne crois pas que ça puisse marcher. Pourtant, quand une personne m’interpelle et me donne des compliments sur ce disque, je suis déjà content. Même si c’était la seule personne à aimer, c’est déjà bien. On n’a pas cette pression que peuvent rencontrer des groupes à qui on a donné 50 millions d’euros pour sortir un tube. Et si ça ne marchait pas? Nous, on s’en branle. Ce disque existe. L’achète qui veut… Maintenant, pour ce qui est du conformisme, on lui nique sa race à celui-là!…

Personnellement, je pense que ce projet prend plus d’ampleur sur scène que sur disque. Etes vous d’accord avec moi? Comment se passent vos sets communs généralement?

ASS: Je suis tout à fait d’accord avec toi, rien à voir entre la scène et le disque. Personnellement, je prends de plus en plus de plaisir aux côtés des Burning Heads.

BH: Je suis également d’accord avec toi. A un détail près, c’est la voix. J’aime bien le skeud car on comprend les textes, je préfère le concert car il y a plus d’énergie directe. Mais le disque reste un moyen pour nous d’accéder à cette finalité qu’est le concert. Notre soupe miracle, c’est en concert qu’on la trouve. Depuis toujours, on travaille et on enregistre en fonction de la scène et des tournées… Parce que c’est là ou on prend le plus d’émotions en pleine gueule. Quand on part sur les routes avec Alif, on nous propose le plus souvent de faire trois sets différents. Le set Burning Heads habituel, celui d’Alif, et le mélange des deux… Ca fait trois heures de musique non-stop, dans trois styles différents. Moi ça me va. Je trouve l’expérience enrichissante.

La valse des guitaristes continue chez les Burning. Est-ce du au fait que l’ouverture musicale dont vous faites preuve rend leur rôle difficile et qu’elle induit qu’ils soient plus complets?

BH: J’en sais trop rien. Je pense qu’on est des grosses têtes de cons souvent. Et que ça ne doit pas plaire à tout le monde. Un groupe, c’est comme un couple, on discute, on s’aime, on s’engueule, mais on avance ensemble. Quand ça saoule quelqu’un du groupe de monter dans le camion pour aller répéter ou pour faire un concert, faut qu’il arrête. On n’est pas les Rolling Stones et ont ne tient pas à le devenir…

On vous a vu début juin à l’Elysée Montmartre, en première partie de Babylon Circus, ou vous ne sembliez pas dans votre élément. Comment avez-vous vécu ce concert?

BH: On a été invité par Babylon Circus à faire leur première partie. En fait, on n’aime pas leur musique. J’aime bien les gens du groupe, c’est pas un problème, mais je pense qu’on n’avait pas notre place là dedans. On a eu en face de nous un “public festif”, mais nous, ce jour là, on était anti-festif, et on avait juste prévu de faire un concert punk à donf. Forcément, ça dénote un peu du reste de la soirée. Mais on s’en branle tranquillos… Es tu venu le 16 juin au Nouveau Casino? C’est le seul concert qui avait de l’intérêt pour nous… On était organisateurs cette fois: 10 euros l’entrée, du punk avec les Gravity Slaves, Burning Heads, BHASS, Alif, plus du mix tech step drum n’bass après.. C’est tout ce qu’on aime…

Quelle question voudriez vous poser à l’autre?

ASS: A quelle heure on joue?

BH: ADbé, c’est ou la salle stp?


Pas de commentaire

Poster un commentaire