Interview : Depth Affect (11-2008)

Interview : Depth Affect (11-2008)

Est-ce que tu peux nous présenter brièvement les quatre personnes qui composent le groupe?

A l’origine, Depth Affect, c’est Rémy et moi, on s’occupe tous les deux de la composition. En ce qui me concerne, je suis complètement autodidacte par rapport à la musique, contrairement à Rémy qui a suivi une formation classique, c’est à dire une formation de piano. C’est sûrement ce qui explique qu’au début nous avions chacun des rôles prédéfinis: Rémy s’occupait des claviers et des mélodies, quant à moi j’étais plus impliqué dans la programmation. Mais tout ça a évolué avec le temps et aujourd’hui, tout le monde empiète un peu sur le travail de l’autre. En plus de nous deux, il y a Fred, rencontré à Lorient et qui officie comme Dj lors de nos concerts, et Xavier, Vj et responsable des visuels pour le groupe, même si sur ce plan on met un peu tous les mains à la pâte étant donné qu’on a tous les trois fait les beaux arts.

Après le bon accueil critique de votre premier album (« Arche Lymb » en 2006), comment avez-vous abordé la conception de « Hero Crisis« ? Il s’agissait de continuer à imprimer sa marque sans pour autant se répéter…

Le « cap-du-deuxième-album » n’est pas un mythe. Pendant cette période, nous avons fait pas mal de morceaux, des choses plus ou moins abouties qu’on ne retrouve pas sur le disque mais qui nous ont permis de faire des essais, d’éviter justement de nous répéter. Mais il faut savoir qu’on a eu un temps de latence entre les deux albums. On s’est fait voler notre matériel juste à la fin de « Arche Lymb », et on s’est retrouvé sans quasiment rien faire pendant six mois. On aurait pu travailler avec un simple ordinateur, avec des softs, mais c’était pas quelque chose qui nous attirait vraiment. On a préféré attendre d’avoir retrouvé tout notre matériel avant de se relancer. Donc par rapport au risque de répétition, je pense que ce temps de latence a été plutôt bénéfique pour nous. Parce que même si on n’est pas forcément partisans d’un changement radical par album, c’est vrai qu’on souhaitait quand même que nos morceaux aient évolués pour sortir un deuxième disque. On aimerait avoir une discographie qui évolue petit à petit dans le temps. Ce n’est pas une critique des autres manières de procéder, on pense juste que c’est celle ci qui nous correspond le mieux.

C’est parce que vous aviez une idée vraiment précise de ce à quoi devait ressembler votre deuxième album que vous n’avez pas retenu ces morceaux?

C’est plus une histoire de feeling, tout simplement. Parfois, quand on part sur quelque chose on sait que ça ne va pas aboutir, on n’est pas du genre à forcer et à rester travailler trois mois sur le même morceau. Mais on avait pas de thème particulièrement défini pour « Hero Crisis », on voulait juste qu’il soit différent du premier mais qu’on retrouve quand même une certaine cohérence, qu’on sente notre patte. On ne s’était pas fixé de date butoir mais nous avions déjà fait quelques morceaux quand notre label nous a dit « ok pour sortir votre deuxième disque ». C’est à ce moment que les choses se sont un peu plus concrétisées et c’est sans doute pas une coïncidence. L’optique est différente quand tu sais que tu dois rendre un album, que tu as tant de minutes à faire… Après, le challenge c’est de réussir à faire quelque chose de cohérent.

Comment procédez-vous pour parvenir à l’équilibre entre des mélodies travaillées et une texture sonore parfois très dense sur certains titres, notamment les trois premiers du disque?

On voulait que le début de l’album soit assez direct, qu’on ait vraiment quelque chose de très dense avec les trois éléments qui nous caractérisent: l’electro, la pop et le rap. D’ailleurs, c’est un passage qui se termine par un morceau assez court avec Subtitle (« Street Level »). Quoi qu’il en soit, on envisage pas de faire les choses sans travailler les mélodies. A la différence du premier album qui était peut-être plus porté sur les rythmiques, pour « Hero Crisis » on était vraiment dans l’optique de travailler davantage les mélodies. Et je pense qu’à ce niveau là on s’est beaucoup améliorés entre le premier et le deuxième album. Pour ce qui est de la manière de travailler, et même si au fond il n’y a pas vraiment de recette, on part souvent d’une mélodie pour ensuite intervenir très vite avec les rythmiques. Comme on stocke énormément de brouillons et qu’on travaille chacun de notre côté, on ne part jamais vraiment de rien quand on commence à travailler.

Depth Affect

A tort ou à raison, « Hero Crisis » m’a rappelé ce qu’un groupe comme dDamage peut produire, ou encore le premier album de Tepr (« Côte Ouest« ). Est-ce une comparaison valable à tes yeux?

C’est vrai que dDamage est un groupe qu’on aime beaucoup avec Rémy, notamment sur scène, où il dégage une puissance assez impressionnante. Après, pour ce qui est de Tepr, nous n’avons pas trop approfondi son travail. Plus généralement, nos influences sont à rechercher du côté d’Aphex Twin (comme tout le monde), des sorties Warp en générale, c’est ce qui nous à réunis au départ quand on s’est rencontré au lycée. Après on a chacun nos préférences: Rémy préfère Squarepusher et moi je penche plus pour Boards Of Canada. Mais il y a aussi plein d’autres artistes qui sont importants pour nous: Legowelt, Wu-Tang Clan, Radiohead, Andre Nickatina, Modeselektor, Will Oldham, Fennesz, Clouddead, James Holden, Geto Boy, Lab Waste

Tu évoquais tout à l’heure votre morceau avec Subtitle. Tu peux nous en dire un peu plus sur cette collaboration?

A la base, le morceau avait été préparé pour un autre rappeur mais finalement ça ne s’est pas fait. Par la suite, on nous a proposé de travailler avec lui et on a tout de suite dit oui, pas de soucis, on aime beaucoup son boulot sur ses premiers albums et encore plus ce qu’il a fait avec son groupe Lab Waste. On est très content du résultat et dernièrement on l’a vraiment rencontré puisqu’on a joué ensemble. C’était une première pour nous, qu’un Mc intervienne en direct sur nos morceaux pendant notre set, ça donne une intensité qu’on n’obtient pas habituellement. Du coup, on lui a demandé de revenir jouer avec nous aux Transmusicales. C’est vraiment un type bien et on espère pouvoir retravailler avec lui sur des enregistrements.

Sur l’album précédent, vous aviez collaboré avec Alias et Cyne, est-ce que vous avez envisagez de tenter quelque chose avec un Mc français?

En fait, on a jamais planifié ce genre de trucs, ça a toujours été des propositions. Mais faire un album « Depth Affect » uniquement avec des rappeurs, c’est pas quelque chose qui nous intéresse. On en est plus à se dire qu’un jour on sortirait bien un album sans vocaux… Après, faire des prods pour des rappeurs et pas forcément pour notre compte, réaliser des albums pour eux, pourquoi pas.

Tu l’as dit tout à l’heure, le groupe comprend un Vj. Est-ce que tu peux décrire à ceux qui ne vous aurait jamais vu sur scène à quoi ressemble un live de Depth Affect?

On est trois sur scène: Rémy aux claviers, xylophone, ou parfois au chant vocoder, moi au laptop, et Dj Kalmook qui est à la MPC et aux platines. On essaie de faire quelque chose d’assez dynamique et dans une certaine mesure de retransformer nos morceaux lors du live. C’est aussi une différence avec ce qu’on a pu faire dans la foulée de « Arche Lymb », sur scène on avait un peu tendance à reproduire l’album, on était un peu scolaire. C’est peut-être pour ça que des gens nous ont conseillés de nous entourer d’instruments, d’incorporer des éléments acoustiques, mais on a pris le choix radical de dire qu’on est un groupe à machines. Et depuis qu’on a pris conscience de ça, on se sent plus à l’aise sur scène, les lives sont plus dynamiques, il nous arrive parfois de créer des passages un peu nouveaux. Pour l’aspect visuel, Xavier travaille les vidéos à partir du moment ou les morceaux sont finis. Mais on ne veut pas que ce soit un clip, on ne veut que créer une ambiance nouvelle et éviter l’aspect trop illustratif. On essaie de faire en sorte que l’image n’aille pas forcément dans le sens du morceau, en accolant parfois un titre agressif et une vidéo un peu soft ou inversement.
demo depth affect live

L’idée d’une sortie CD/DVD est toujours d’actualité?

C’est une idée de Xavier qui est toujours d’actualité, mais c’est compliqué de trouver des distributeurs pour ça. Donc on espère pouvoir sortir un DVD prochainement, peut-être pas en complément du prochain album mais comme un projet totalement indépendant.


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